Les Kurdes sont le « bouc émissaire idéal pour la Turquie et l’Iran »

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La Turquie a lancé dimanche une nouvelle offensive contre des groupes kurdes en Syrie dans le cadre d’une campagne aérienne simultanée contre le Kurdistan irakien lancée par le régime iranien en difficulté – affrontant les Kurdes des deux côtés de leur patrie frontalière.

La Turquie a lancé ce qu’elle a appelé « l’opération Sword-Claw » le 20 novembre, bombardant des groupes kurdes en Syrie. Ces derniers jours, Ankara a frappé plusieurs autres cibles dans les régions de Syrie contrôlées par les Kurdes alors que le président turc Recep Tayyip Erdogan menaçait également de lancer une offensive terrestre dans le pays « bientôt ».

La Turquie affirme que des combattants kurdes du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) et des YPG (Unités de protection du peuple) basées en Syrie sont responsables d’une attaque meurtrière à Istanbul le 13 novembre (Des groupes kurdes ont nié les accusations). Ankara semble avoir les yeux rivés sur la ville symbolique de Kobane, dans le nord de la Syrie, que les forces kurdes ont saisie aux djihadistes du groupe État islamique en 2015.

Pendant ce temps, l’Iran bombarde le Kurdistan irakien – accusant les mouvements kurdes d’avoir fomenté la vague de protestations nationales qui a secoué le régime depuis que Mahsa Amini, une jeune femme kurde, est décédée le 13 septembre sous la garde de la « police des mœurs » de la République islamique.

Pour mieux comprendre les enjeux au Moyen-Orient alors que les Kurdes se retrouvent attaqués à la fois par la Turquie et l’Iran, FRANCE 24 s’est entretenu avec Adel Bakawan, directeur du Centre de recherche français sur l’Irak.


Les Kurdes sont attaqués à la fois par la Turquie en Syrie et par l’Iran dans le nord de l’Irak. Les deux pays ont-ils coordonné leurs offensives ?

Il n’y a aucune preuve concrète qu’Ankara et Téhéran travaillent ensemble sur ce sujet, mais nous ne pouvons pas l’exclure. Logiquement, vous pouviez voir pourquoi ce serait dans l’intérêt des deux pays. La Turquie et l’Iran traversent tous deux des périodes délicates. La Turquie est en proie à une grave crise économique et Erdogan n’est pas en très bonne position à l’approche des élections présidentielles de juin 2023. Il est donc dans une position très difficile chez lui, et à l’étranger, il y a des tensions diplomatiques constantes avec l’Occident.

En ce qui concerne l’Iran, le mouvement de contestation ébranle la République islamique et ne montre aucun signe d’essoufflement. Gardant à l’esprit que les deux nations considèrent leurs populations kurdes comme des menaces à leur intégrité territoriale, les Kurdes font le bouc émissaire idéal pour la Turquie et l’Iran au milieu de leurs crises respectives.

Pourquoi Erdogan cible-t-il les Kurdes en Syrie ?

Plus nous nous rapprochons des élections présidentielles de l’année prochaine, plus Erdogan devra unir ses partisans en désignant un ennemi qui menace la sécurité, la stabilité et la cohésion nationale de la Turquie. Cela lui permettra de se présenter à l’électorat comme le sauveur de la Turquie, détournant l’attention de son piètre bilan économique. Il a ainsi désigné comme ennemi les Kurdes syriens, dont le territoire est contrôlé par la filiale locale du PKK, qui est classée comme organisation terroriste par l’UE et les États-Unis ainsi que par la Turquie.

Erdogan tient également à tirer parti du mécontentement croissant face à la présence de 3 millions de réfugiés syriens en Turquie, que les gens expriment de plus en plus avec véhémence. Le président turc tente de tourner cette question à son avantage électoral. En particulier, Erdogan veut tenir sa promesse – faite bien avant l’attentat d’Istanbul qu’il utilise pour justifier son offensive actuelle en Syrie – de créer une zone tampon entre la Turquie et les différents territoires du nord de la Syrie contrôlés par des groupes kurdes. En lançant une offensive terrestre sur la ville emblématique de Kobané, il pourra créer une bande de terre ininterrompue hors des zones déjà occupées par l’armée turque et ses alliés. Et il veut envoyer des réfugiés syriens dans cette partie du nord de la Syrie actuellement occupée par les Kurdes.

Qu’est-ce que l’Iran essaie d’accomplir en attaquant des cibles kurdes en Irak ?

Malgré une répression féroce, le gouvernement iranien n’a pas été en mesure d’assujettir le mouvement de protestation qui a émergé le 16 septembre. La République islamique a tenté de le présenter comme une agitation pour l’indépendance dans des parties du pays habitées par la minorité kurde ; il essaie de présenter le mouvement en termes ethniques. Le régime a même tenté de prétendre que les manifestations sont un soulèvement sunnite défendu par l’Arabie saoudite, les pays occidentaux et le gouvernement régional du Kurdistan en Irak pour déstabiliser l’Iran chiite.

Toutes ces tentatives de présenter le mouvement comme une force ethnique de division ont échoué car les manifestations sont clairement nationales. Ce n’est pas comme si cela ne se produisait que dans les villes kurdes ou baloutches. Et les manifestants ont pris la jeune victime kurde, Mahsa Amini, comme symbole national de leur lutte, référence fédératrice pour la jeunesse du pays.

Alors parce que cette tentative de semer la division intérieure a échoué, la République islamique se tourne vers ses ennemis étrangers : l’Arabie saoudite, Israël et le gouvernement régional du Kurdistan. Bien sûr, il est plus facile d’attaquer le Kurdistan irakien, où le Parti démocratique kurde d’Iran (PDKI) et le Parti révolutionnaire Komala du Kurdistan iranien ont tous deux eu des camps au cours des trois dernières décennies. L’Iran accuse ces deux groupes de fomenter des manifestations sur son territoire.

Ces derniers jours, Téhéran a fait pression sur le nouveau gouvernement de Bagdad, dominé par des factions pro-iraniennes, pour faire pression sur le gouvernement régional du Kurdistan afin qu’il expulse le KDPI et le parti Komala d’Irak.

Et enfin – d’un point de vue cynique – les Iraniens savent parfaitement qu’ils peuvent attaquer le Kurdistan irakien sans grande protestation ni de Bagdad ni de l’Occident.

Cet article a été traduit de l’original en français.

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