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Des affaires ont été ouvertes mercredi devant la Cour européenne des droits de l’homme contre la France et la Suisse pour des manquements présumés à la protection de l’environnement, marquant la première fois que des gouvernements sont sur le banc des accusés pour une prétendue inaction face au changement climatique.
L’affaire contre la Suisse repose sur une plainte d’une association de personnes âgées – qui se fait appeler le « Club des seniors du climat » – préoccupée par les conséquences du réchauffement climatique sur leurs conditions de vie et leur santé, a déclaré la CEDH.
Ils accusent les autorités suisses de divers manquements en matière de changement climatique qui, selon eux, constituent une violation de l’obligation du gouvernement de protéger la vie, les maisons et les familles des citoyens.
« Nous nous battons depuis des années », a déclaré Bruna Molinari, 81 ans, qui vit dans le canton du sud du Tessin « où la pollution est la pire ».
« J’espère que le tribunal tranchera en notre faveur pour que la Suisse fasse mieux qu’elle ne l’a fait jusqu’à présent », a-t-il ajouté avant l’audience.
La moyenne d’âge est de 73 ans dans le club suisse, soutenu par Greenpeace Suisse.
Une cinquantaine de ses 2 000 membres étaient attendus à Strasbourg pour l’audition.
Alain Chablais, représentant le gouvernement suisse, a déclaré au tribunal qu’il était « infondé d’affirmer ou de suggérer que la Suisse ne fait rien ».
La CEDH « n’a pas à devenir le lieu où se décide la politique nationale de protection du climat », a-t-il ajouté.
Mais l’avocate des plaignants, Jessica Simor, a déclaré que ses clients souffraient « déjà des effets du changement climatique » que la Suisse ne faisait pas assez pour arrêter.
Les températures augmentaient « deux fois plus vite » dans la nation alpine que la moyenne mondiale, a-t-elle ajouté.
« La chaleur tue… augmentant les risques de problèmes rénaux, de crises d’asthme, de difficultés cardiovasculaires… et provoque des symptômes particulièrement aigus chez les personnes âgées, plus particulièrement les femmes âgées ».
L’affaire contre la France a été portée par Damien Careme, un ancien maire de Grande-Synthe, une banlieue de Dunkerque dans le nord de la France, qui soutient également que le gouvernement central a manqué à son obligation de protéger la vie en prenant des mesures insuffisantes pour prévenir le changement climatique .
Lorsqu’il était maire, Careme a porté l’affaire devant la justice française au nom de sa ville mais aussi en son propre nom, affirmant que le changement climatique augmentait le risque d’inondation de sa maison.
Le plus haut tribunal administratif de France a statué en faveur de la ville contre le gouvernement central en 2021, mais a rejeté l’affaire individuelle portée par Careme, qu’il a ensuite portée devant la CEDH.
« Les enjeux sont extrêmement élevés », a déclaré Corinne Lepage, ancienne ministre française de l’Ecologie et l’une des avocates de Careme dans cette affaire.
« Si la Cour européenne reconnaît que les défaillances climatiques violent le droit des individus à la vie et à une vie familiale normale, cela devient alors un précédent dans tous les Etats membres du Conseil et potentiellement dans le monde entier », a-t-elle déclaré à l’AFP.
La Cour européenne des droits de l’homme – dont les membres sont les 46 États membres du Conseil de l’Europe – a reconnu dans une déclaration préalable aux audiences que la Convention européenne des droits de l’homme, sur laquelle elle doit fonder ses jugements, n’inclut en réalité un droit à un environnement sain.
Mais sa décision de prendre les cas de mercredi était basée sur le fait que l’exercice des droits existants de la convention pourrait être compromis par une atteinte à l’environnement ou une exposition à des risques environnementaux.
Une troisième affaire en cours, sans date d’audience à ce jour, a été intentée par de jeunes requérants portugais affirmant que l’inaction climatique de dizaines d’États avait contribué aux vagues de chaleur au Portugal qui, selon eux, affectaient leurs droits.
Bien que ces affaires soient une première pour la CEDH, des gouvernements ont par le passé été traduits en justice dans leurs juridictions nationales.
En 2019, la Cour suprême néerlandaise a ordonné au gouvernement de réduire les émissions de gaz à effet de serre à la suite d’une plainte déposée par une organisation environnementale.
Deux ans plus tard, un tribunal de Paris a reconnu le gouvernement français coupable d’inaction climatique et l’a condamné à payer les dommages qui en résultent après que quatre ONG ont déposé une plainte.
Les audiences de mercredi ne sont que le début d’une procédure qui devrait prendre plusieurs mois avant que le tribunal ne rende ses verdicts.
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