Une série d’incidents en mer Baltique impliquant des câbles de données suscite des soupçons de sabotage. Le cargo chinois « Yi Peng 3 », naviguant près des côtes suédoises au moment des dommages, est suspecté. Après des interruptions de services, il désactive son signal AIS pendant plusieurs heures, éveillant l’attention des autorités. Son parcours et ses liens avec des ports stratégiques russes soulèvent des inquiétudes, alors que des investigations sont en cours pour établir des connexions potentielles avec ces événements.
Une Situation Étrange en Mer Baltique
Est-ce le fruit d’un sabotage ou simplement un accident ? Depuis le début de la semaine, l’Europe est en émoi face aux dégâts infligés à deux câbles de données en mer Baltique. Dimanche matin, peu avant 9 heures, la liaison entre la Lituanie et la Suède est soudainement interrompue. Vingt heures plus tard, c’est au tour de la ligne reliant la Finlande à l’Allemagne de tomber en panne. Très vite, politiciens et experts s’accordent à penser qu’il s’agit là d’un événement tout sauf fortuit.
Le Mystère du Cargo Chinois
Des éléments commencent à émerger, laissant supposer qu’un cargo chinois, le « Yi Peng 3 », pourrait être lié à ces incidents. Ce navire se trouvait en effet en route près des côtes suédoises au moment des dommages. Mais quelle pouvait être sa mission réelle ? Faisons un retour sur les événements.
Le 15 novembre, le « Yi Peng 3 » quitte le port d’Ust-Luga, en Russie. Les sources médiatiques évoquent différentes destinations, Port Saïd en Égypte étant la plus souvent citée. Grâce à Marinetraffic, un service d’analyse maritime, nous pouvons retracer le parcours du navire, bien que sa destination initiale demeure floue.
Le 17 novembre, entre 1h30 (UTC) et 11h19, le cargo passe près de l’île de Gotland, croisant le câble de données reliant la Suède à la Lituanie. Vers 10 heures, une perturbation est signalée par le fournisseur de télécommunications lituanien Telia, entraînant une coupure entre Sventoji, en Lituanie, et Gotland.
Après son passage à Gotland, le « Yi Peng 3 » désactive son signal AIS pendant 7,5 heures, un acte illégal pour un cargo. Lorsqu’il réapparaît sur Marinetraffic à 22h41, il se situe au sud de l’île d’Öland.
Trois heures plus tard, le 18 novembre à 2 heures (UTC), les systèmes du fournisseur finlandais Cinia déclenchent une alarme. Le câble C-Lion1, reliant Helsinki à Rostock, est endommagé, coïncidant avec le passage du « Yi Peng 3 » sans signal AIS.
Les autorités demeurent suspicieuses à l’égard du cargo chinois, et la marine danoise commence à le suivre le lundi soir. Plusieurs patrouilleurs se relaient pour surveiller le navire.
Depuis mardi, le « Yi Peng 3 » navigue dans le Kattegat. Le ministère danois de la Défense a confirmé son suivi, mais n’a pas encore précisé si le cargo a été intercepté ou si des discussions ont eu lieu avec les autorités chinoises. Un pilote danois a été embarqué sur le navire le mardi à 7h53, selon Marinetraffic.
La position du « Yi Peng 3 » est cruciale, car les eaux territoriales danoises s’étendent sur douze milles marins. Actuellement, le navire se trouve juste à la limite de ces eaux.
Des journalistes danois ont réussi à obtenir une déclaration du capitaine du cargo, qui a affirmé que le navire attendait des instructions de ses propriétaires, lesquels auraient été sollicités par les autorités chinoises pour collaborer à l’enquête.
Le « Yi Peng 3 » appartient à la société Ningbo Yipeng Shipping Co. Ltd., dont les propriétaires sont deux hommes d’affaires chinois peu connus. En plus de ce navire, la société possède deux autres cargos, transportant généralement des produits en vrac tels que des minerais, du charbon ou des céréales. Actuellement, le « Yi Peng 3 » serait en train de transporter des engrais, avec un équipage de 22 personnes, principalement chinois.
Le cargo a déjà fait escale dans des ports stratégiques tels que Mourmansk et Taman, qui sont d’une grande importance pour les forces armées russes. Il a transporté plusieurs fois du charbon en provenance de ces régions, bien qu’il ne soit inscrit sur aucune liste de sanctions.
La présence d’un navire chinois dans des ports russes n’est pas nécessairement suspecte, surtout dans le contexte actuel où les sanctions occidentales ont conduit de nombreux cargos tiers à prendre en charge le transport de marchandises russes. Le blé représente le principal produit d’exportation de la Russie vers l’Égypte, destination potentielle du « Yi Peng 3 ».
Il est notable qu’un pilote russe ait été à bord lors du départ du cargo d’Ust-Luga, ce qui n’est pas inhabituel dans la région. Cependant, ce qui soulève des inquiétudes, c’est le lien d’Albatros, l’entreprise à laquelle appartient ce pilote, avec Rosatom, l’agence nucléaire d’État russe. Rosatomport, branche de cette agence, est spécialisée dans les relevés sous-marins et possède une connaissance approfondie des infrastructures critiques en mer.
Stetschenzew, le pilote, a dirigé le cargo le 15 novembre et a probablement quitté le navire le même jour. Les préoccupations entourant le « Yi Peng 3 » continuent de croître alors que les enquêtes se poursuivent.