L’assassinat d’Indira Gandhi le 31 octobre 1984 par deux gardes sikhs a été une réponse à l’Opération Blue Star, une intervention militaire controversée contre le Temple d’Or en juin de la même année. Cette opération, perçue comme une attaque contre la foi sikh, a exacerbé les tensions entre les sikhs et l’État indien. Le mouvement Khalistan, né de ce ressentiment, continue d’influencer les relations entre l’Inde et des pays comme le Canada, où les séparatistes sont soutenus par la diaspora sikh.
Le 31 octobre 1984, des balles ont frappé Indira Gandhi alors qu’elle se dirigeait vers une interview dans le jardin de sa résidence à Delhi. Deux de ses gardes du corps, Beant Singh et son complice, ont ouvert le feu sur la Première ministre indienne âgée de 66 ans. Beant Singh a tiré cinq balles avec son revolver, tandis que son partenaire a vidé le chargeur de sa mitraillette. Tous deux étaient sikhs, cherchant ainsi à venger l’assaut tragique du Temple d’Or, survenu cinq mois auparavant.
En juin 1984, Indira Gandhi avait ordonné à l’armée de mener une opération militaire au sanctuaire sikh d’Amritsar, où se trouvaient des séparatistes radicaux. Cette opération, connue sous le nom d’Opération Blue Star, visait à éliminer le mouvement Khalistan du complexe sacré. Malheureusement, cette intervention a causé des pertes massives, tant parmi les séparatistes que parmi les soldats, ainsi que chez des milliers de pèlerins sikhs présents sur place.
Pour la communauté sikh, cette opération a été perçue comme une attaque directe contre leur foi. Le sikhisme, fondé au 15ème siècle par Guru Nanak, est la plus petite des religions monothéistes au monde, avec environ 25 millions de fidèles en Inde, principalement dans l’État du Punjab. Depuis l’époque coloniale, les sikhs ont été bien représentés dans les forces de l’ordre et l’armée indienne, mais les événements de 1984 ont mis en question leur loyauté envers l’État indien.
Les sikhs et leur lutte pour l’identité culturelle
De nombreux sikhs considèrent encore l’assassinat d’Indira Gandhi comme un acte de vengeance légitime pour l’Opération Blue Star. Beant Singh, abattu sur les lieux par d’autres gardes, est perçu par certains comme un martyr plutôt qu’un meurtrier. Son héritage perdure, célébré chaque année au Temple d’Or, et son fils a récemment été élu au parlement du Punjab. Les répercussions de ces événements continuent d’affecter les relations entre l’Inde et d’autres pays, notamment le Canada.
Depuis des années, l’Inde accuse le Canada d’inaction face au mouvement Khalistan, qui bénéficie d’un soutien significatif parmi la diaspora sikh. Les séparatistes militants sont considérés comme des terroristes par Delhi, qui réclame leur extradition. La tension a atteint un point critique lorsque, l’année dernière, un leader sikh a été assassiné au Canada, Ottawa accusant alors le renseignement indien d’être impliqué. Ce conflit a conduit à une détérioration des relations diplomatiques, illustrée par l’expulsion mutuelle des ambassadeurs en octobre dernier.
La radicalisation à travers Bhindranwale et le Temple d’Or
L’idée de Khalistan a émergé dans les années précédant l’indépendance en 1947, alors que l’Inde et le Pakistan étaient divisés religieusement. Beaucoup de sikhs se demandaient pourquoi ils ne devraient pas avoir leur propre État au Punjab, à l’instar des musulmans. Bien que le statut du Punjab ait été rehaussé en 1966, cela n’a pas suffi à apaiser tous les sikhs.
Dans les années 1970, la popularité de l’idée de Khalistan a de nouveau augmenté, en partie à cause des réformes agricoles de la « Révolution verte », qui ont mis à mal de nombreux petits agriculteurs. Ce contexte de crise sociale a vu émerger Jarnail Singh Bhindranwale, un prédicateur charismatique qui a incité les jeunes à renouer avec leurs traditions et à lutter contre l’alcoolisme et la délinquance.
Initialement, Bhindranwale plaidait pour plus de droits pour le Punjab. Cependant, son mouvement a rapidement pris une tournure radicale. Après avoir fui une arrestation, il s’est réfugié dans le Temple d’Or en 1982, où il a armé ses partisans et transformé le sanctuaire en forteresse. L’armée indienne a finalement lancé une opération pour reprendre le contrôle du temple en juin 1984, entraînant des pertes humaines massives, tant parmi les militants que parmi les pèlerins innocents. Ce triste événement a intensifié le ressentiment contre le gouvernement indien et a alimenté l’insurrection au Punjab, entraînant des violences persistantes jusqu’en 1995.