Le cinéma hongrois connaît un renouveau avec des productions locales comme « Gone Running » et « How Could I Live Without You? » qui dominent le box-office. Des réalisateurs de renom, tels que László Nemes et Ildikó Enyedi, préparent de nouveaux projets, tandis que des difficultés de financement persistent. Malgré les obstacles, les cinéastes démontrent une détermination forte, en se regroupant pour surmonter les défis et en lançant des initiatives pour soutenir l’industrie.
Le Renouveau du Cinéma Hongrois
Une nouvelle réjouissante, voire inattendue, a captivé les passionnés de cinéma en Hongrie : deux productions locales dominent le box-office en ce début d’année. Il s’agit de « Gone Running », un remake local de la comédie romantique tchèque « Women on the Run », réalisé par Gábor Herendi, et de la comédie musicale romantique « How Could I Live Without You? », dirigée par Dénes Orosz.
Ces films à succès, représentés par NFI World Sales lors du Marché du Film Européen, couronnent une année marquée par des réussites inattendues, comme le drame artistique « Lesson Learned » de Bálint Szimler, qui a attiré plus de 100 000 spectateurs. Cela témoigne de la volonté des cinéastes hongrois de changer la donne par rapport aux tendances récentes.
Un Nouveau Souffle Créatif
Autrefois, l’industrie cinématographique hongroise était fortement influencée par le virage nationaliste sous le gouvernement du Premier ministre Viktor Orbán, produisant des épopées historiques souvent en deçà des attentes au box-office. Cependant, ces dernières années, des récits contemporains et des films de genre ont pris le devant de la scène. Des titres comme la comédie de cambriolage « Tonight We Kill » et la comédie sportive « The Rebound », avec Patrick Duffy, illustrent cette évolution.
L’année en cours s’annonce particulièrement prometteuse pour l’industrie cinématographique hongroise. Des figures de proue telles que László Nemes, lauréat d’un Oscar pour « Son of Saul », et Ildikó Enyedi, également nominée aux Oscars et récipiendaire de l’Ours d’Or à Berlin pour « On Body and Soul », s’apprêtent à dévoiler leurs nouveaux projets. Parallèlement, la réalisatrice renommée Lili Horvát entame la production de son premier film en anglais, intitulé « My Notes on Mars », avec Andrew Scott et Greta Lee.
Néanmoins, en coulisses, de nombreux cinéastes expriment leur frustration face aux fluctuations du soutien à la production nationale. Viktoria Petrányi, de Proton Cinema, souligne les difficultés rencontrées, tandis qu’elle développe des projets avec des réalisateurs comme Kornél Mundruczó, Gábor Reisz, Hajni Kis, et György Kárpáti Mór. Elle insiste sur la nécessité de financer ces œuvres, que ce soit par des co-productions complexes ou en utilisant des micro-budgets.
L’Institut National du Film de Hongrie, avec un budget annuel de près de 43 millions de dollars, a été critiqué pour une politisation croissante dans ses décisions de financement. Les cinéastes jugent cela symptomatique d’un virage à droite plus large au sein du pays. Bien que l’NFI défende ses actions, l’industrie ressent les effets des récents bouleversements mondiaux, comme la pandémie et la crise de l’approvisionnement, qui ont particulièrement impacté le cinéma indépendant.
Petra Iványi, de Lupa Pictures, qui a récemment terminé la production de « Hyenas », souligne la fragilité du financement dans le secteur. Elle produit également « The Origin of the World », le premier long métrage de Borbála Nagy, soutenu par le programme Incubator de l’NFI. Ce programme a permis de financer de nombreux premiers films prometteurs, comme « White Plastic Sky », qui a été présenté à la Berlinale 2023.
Ádám Farkas, producteur de « Growing Down », reconnaît le soutien de l’NFI, bien que l’inflation ait fait grimper les coûts. Il partage les préoccupations de nombreux réalisateurs quant au manque de soutien en Hongrie pour les jeunes talents. « C’est formidable que tant de cinéastes aient eu leur chance, mais il est essentiel qu’ils puissent en avoir une seconde, » déclare-t-il.
Ce succès malgré les obstacles témoigne de la détermination des cinéastes hongrois. Des films tels que « Explanation for Everything » de Reisz et « Lesson Learned » de Szimler ont été financés indépendamment, témoignant d’un esprit de collaboration avec de nombreux producteurs impliqués.
Szimler fait partie des cinéastes qui ont initié le Budapest Intl. Film Festival et le Cine-Collegium Budapest, un fonds indépendant visant à combler les lacunes financières dans l’industrie. « Nous sommes à un moment charnière dans le cinéma hongrois et nous tentons de bâtir quelque chose de solide, » conclut Szimler, avec espoir pour l’avenir.