Black Bag : Steven Soderbergh prêt à relever un défi audacieux avec son dernier film

Steven Soderbergh, bien que moins associé à un style distinctif que d’autres réalisateurs, trouve une vitalité créative à travers ses « petits » films indépendants. Des œuvres comme « Schizopolis » et « Bubble » illustrent son besoin de revenir à ses racines, tandis que des projets récents comme « Black Bag » montrent son potentiel à innover. Malgré une tendance à privilégier le processus créatif au détriment de l’impact, il est temps pour lui de relever des défis audacieux et de captiver à nouveau le public.

Le Voyage Cinématographique de Steven Soderbergh

Certains réalisateurs, comme Hitchcock et Tarantino, incarnent un style unique qui leur est propre. Steven Soderbergh, en revanche, n’a jamais vraiment été dans cette catégorie, du moins jusqu’à ce qu’il se lance dans ses « petits » films. Ces œuvres indépendantes à budget modeste sont devenues une manière pour lui de se ressourcer, lui rappelant que le plaisir de créer des films est essentiel.

Les Petits Films et Leur Impact

On pourrait considérer « Full Frontal » (2002) comme son premier « petit » film officiel, une satire d’Hollywood réalisée pour seulement 2 millions de dollars. Alternativement, « Bubble » (2005), un drame criminel existentialiste, pourrait également revendiquer ce titre. Cependant, certains pourraient arguer que le véritable « petit » film de Soderbergh est « Schizopolis », une œuvre expérimentale qu’il a réalisée entièrement seul en 1996, après avoir vécu l’expérience éprouvante de la réalisation de « The Underneath ».

Au Festival du film de Toronto de cette année-là, j’ai eu l’opportunité de prendre le petit-déjeuner avec Soderbergh. Notre conversation, pleine de passion, a duré des heures, alimentée par le bonheur qu’il ressentait à revenir à ses racines avec « Schizopolis » et à l’idée de réaliser « Out of Sight ». Sept ans après « Sex, Lies, and Videotape », il redécouvrait son identité de cinéaste.

Pour Soderbergh, les petits films sont essentiels. Ils maintiennent son esprit créatif vivant et en phase avec son art. Agissant comme son propre directeur de la photographie depuis 25 ans et monté parfois ses propres films, il jouit d’un niveau de contrôle que peu de réalisateurs possèdent. Dans ses petits projets, Soderbergh est véritablement le maître. Pourtant, il reste un grand nom dans un espace cinématographique restreint.

Les petits films sont désormais un genre à part entière, et les admirateurs de Soderbergh ont tous leurs favoris. Personnellement, je classerais « The Girlfriend Experience », « Kimi » et « Bubble » parmi les meilleurs. « Side Effects », « The Laundromat » et « Let Them All Talk » sont également bons, tandis que « Full Frontal », « Haywire » et « Presence » sont plus moyens. Globalement, ce n’est pas un bilan négatif. Je n’ai même pas mentionné son dernier film, le très acclamé « Black Bag », un thriller captivant sur des espions britanniques, qui, bien qu’il ait coûté 50 millions de dollars, pourrait être considéré comme l’apogée de ses petits films. En termes de qualité, je le placerais au sommet de sa filmographie indépendante.

Cela soulève une question : Soderbergh utilise-t-il ces petits films comme un moyen de rester équilibré tout en prenant moins de risques ? Bien que j’apprécie beaucoup de ses œuvres, la raison pour laquelle peu d’entre elles apparaissent sur ma liste des 10 meilleurs (à l’exception de « The Girlfriend Experience ») est qu’elles ont souvent une nature éphémère. Il semble que le processus de création soit plus important pour lui que le résultat final. Cela rappelle la période où Woody Allen produisait une comédie par an sans grande ambition. Les films de Soderbergh sont bons, parfois même vibrants, mais je pense qu’il a joué la sécurité trop longtemps.

Il y a 25 ans, Soderbergh a réalisé « Traffic », un drame puissant sur la guerre des drogues, qui a remporté un succès inattendu. À cette époque, personne ne s’attendait à un tel triomphe, mais le film a rapporté 124 millions de dollars. Aujourd’hui, le paysage cinématographique a changé, mais Soderbergh, envisageant une suite à son thriller « Contagion », a les moyens de sortir de sa zone de confort. Il est temps pour lui d’oser prendre de grandes initiatives. En tant que maître du cinéma, il est temps qu’il nous prouve qu’il peut à nouveau capter l’attention des spectateurs, en réalisant un film si immersif qu’il allume une étincelle dans l’air.