Accepter les critiques : Pourquoi est-il si difficile de recevoir des retours ?

Accepter les critiques : Pourquoi est-il si difficile de recevoir des retours ?

La saison hivernale est souvent associée aux rhumes, ce qui amène à réfléchir sur la manière de donner des retours constructifs, notamment au travail. Les défis liés à la critique incluent la peur de blesser ou d’irriter les collègues. Malgré cette crainte, des études montrent que la plupart des employés souhaitent recevoir des critiques pour s’améliorer. Une méthode efficace pour donner du feedback se base sur la perception, l’impact et le désir de changement, favorisant ainsi un environnement de travail plus productif.

La saison hivernale est souvent synonyme de virus et de rhumes. Récemment, un de mes collègues était constamment enrhumé, produisant un bruit de mouchage qui me traversait les nerfs. Cela m’a amené à réfléchir à la manière de lui faire comprendre, poliment, qu’il pourrait peut-être éviter ce comportement. Mais est-ce que j’ai le droit de lui en parler ?

Les défis du feedback négatif

Donner un retour constructif peut s’avérer être une tâche ardue pour beaucoup. Qu’est-ce qui nous freine à souligner les comportements qui pourraient améliorer la convivialité, la décence ou l’efficacité des personnes autour de nous ?

La liste des raisons est vaste. Nombreux sont ceux qui aspirent à l’harmonie, cherchant à éviter les tensions, les disputes ou les malentendus. L’inquiétude de blesser ou d’irriter quelqu’un avec une critique est omniprésente. Après tout, il s’agit souvent de traits ou de comportements personnels. Critiquer une performance jugée insuffisante est aussi délicat, car il se peut que la personne ait déjà donné le meilleur d’elle-même ou qu’elle soit satisfaite du résultat. En conséquence, un retour négatif peut facilement écorcher l’ego.

De plus, il est difficile de croiser régulièrement une personne au bureau après avoir émis une critique mal accueillie. Comment maintenir une collaboration productive lorsque des mots ont blessé ? Les dirigeants partagent souvent cette appréhension : une étude révèle qu’un tiers d’entre eux se sentent mal à l’aise de donner un retour direct sur la performance, par crainte d’une réaction négative de l’employé.

Ces éléments laissent penser que beaucoup préfèrent recevoir uniquement des retours positifs. Qui n’apprécie pas d’entendre à quel point il est formidable ? Pourtant, paradoxalement, une étude menée par Zenger Folkman montre que, bien que peu de personnes aiment donner un feedback négatif, la majorité aspire à recevoir des critiques constructives. Cela fait sens : la plupart d’entre nous souhaitent progresser et s’améliorer dans leur travail. Des retours clairs peuvent être plus bénéfiques que de simples encouragements.

Le rôle essentiel des retours dans l’engagement

Néanmoins, cette perspective est souvent trop simpliste. « Nous ne sommes pas des machines pensantes, mais des êtres sensibles qui pensent », souligne le neuroscientifique Antonio Damasio. En tant qu’êtres émotionnels, nous avons tendance à réagir par la défense face à toute menace à notre image de soi. Nous voulons être perçus comme compétents et dignes de respect.

Cette tension entre la rationalité et le bien-être émotionnel rend le feedback critique délicat à aborder. Souvent, le choix le plus simple est d’opter pour une non-agression tacite dans le milieu professionnel : nous évitons les conflits et tolérons silencieusement les comportements qui nous dérangent. Cependant, cette approche ne sert personne. Ignorer les problèmes ou les balayer sous le tapis ne fait qu’aggraver la situation pour tous.

En revenant à une approche plus rationnelle, 72 % des personnes interrogées estiment qu’elles amélioreraient leur performance si leurs supérieurs leur donnaient des retours critiques constructifs. Non seulement le feedback améliore les performances, mais il influence également positivement l’engagement des employés. Des recherches montrent que les dirigeants dotés de solides compétences en feedback augmentent l’engagement au sein de leurs équipes.

Adopter une méthode efficace pour un feedback constructif

Pour ces raisons, il est essentiel de développer les compétences en feedback des leaders. Une méthode efficace à adopter est la méthode des trois W : Perception, Impact, Désir.

La première étape consiste à décrire ce qui a été perçu : qu’est-ce qui a été dit, écrit ou fait ? Ensuite, il faut aborder l’impact : quel effet ce comportement a-t-il eu sur les autres ? Cela peut être un sentiment ou un fait concret, comme un retard au début d’une réunion, un malentendu causé par une communication trop brève, ou une erreur due à une mauvaise formule.

Enfin, la dernière étape consiste à exprimer le désir : quel changement de comportement espérons-nous de l’autre à l’avenir ? Lors de mes formations sur le feedback, de nombreux dirigeants rapportent que cette méthode simple leur permet de donner des retours plus souvent et avec plus de confiance, malgré leurs appréhensions.

Pour ma part, après avoir longtemps supporté le bruit incessant de mon collègue, j’ai pris l’initiative de lui offrir une boîte de mouchoirs, sans dire un mot. Parfois, les gestes parlent plus fort que les mots.

Nicole Kopp est psychologue du travail et des organisations et cofondatrice de la société de conseil Go-Beyond.