Arrestations lors de manifestations en France : la police utilise-t-elle les tribunaux de manière abusive ?

Des centaines de manifestants ont été arrêtés la semaine dernière en France. Les manifestations ont éclaté dans tout le pays contre la réforme des retraites du gouvernement. Plusieurs questions sont soulevées quant à savoir si cette tactique d’arrestation massive par la police est utilisée simplement pour frustrer le mouvement de protestation.

Arrestations massives : 97 % arrêtés sans infraction réelle

Après le premier rassemblement spontané du 16 mars, 292 personnes ont été placées en garde à vue et présentées au parquet, pour recevoir un avertissement. Mais seuls neuf manifestants ont été inculpés d’infractions réelles. Cela signifie que près de 97 % – soit 283 dossiers – ont été clôturés sans aucun suivi ni mise en accusation.

La garde à vue « arbitraire »

Les médias français ont même rapporté que deux mineurs autrichiens « en voyage scolaire » se sont retrouvés en garde à vue à la suite des manifestations du 16 mars. L’ambassade d’Autriche est intervenue pour les faire libérer. Des questions sont maintenant soulevées quant à savoir si cette tactique d’arrestation massive par la police est utilisée simplement pour frustrer le mouvement de protestation.

Cependant, avocats, magistrats et hommes politiques dénoncent la garde à vue « arbitraire », la voyant, comme dans d’autres mouvements de protestation ces dernières années, comme une « répression du mouvement social ». Certains Parisiens de passage alors que les manifestations se poursuivaient ont même été arrêtés et placés en garde à vue sans qu’on leur en donne une raison claire.

Des arrestations arbitraires : un thème récurrent depuis le mouvement des gilets jaunes

La pratique d’arrestations massives avait déjà été critiquée lors du mouvement des « gilets jaunes ». « Le nombre jamais vu d’interpellations et de gardes à vue intervenues de manière préventive », avait relevé le Défenseur des droits dans son rapport 2018 citant le 8 décembre, où près de 2 000 personnes avaient été interpellées dans toute la France. Amnesty International France a également publié un rapport sur les « arrestations arbitraires » lors d’un rassemblement le 12 décembre 2020 à Paris contre la loi « sécurité mondiale » – 142 personnes interpellées et près de 80 % libérées sans poursuites. En effet, un compte Twitter a même été créé pour compiler toutes les vidéos documentant les violences policières depuis 2019. Le compte a déclaré avoir relaté plus de 5 000 cas d’abus présumés depuis lors.

Une instrumentalisation de la justice ?

Dans un communiqué, le Syndicat de la Magistrature (SM), le syndicat des magistrats, a également dénoncé les nombreuses interpellations policières, y voyant une « répression du mouvement social ». « C’est la première fois que le gouvernement français utilise le droit pénal pour dissuader des manifestants de manifester et d’exercer leur liberté », a déclaré Raphaël Kempf, avocat français spécialisé dans les méthodes de répression judiciaire. Plusieurs politiciens de gauche ont également critiqué les « arrestations arbitraires ».

Les forces de police ne procèdent pas à des « arrestations injustifiées »

Le ministère français de l’Intérieur a déclaré mardi « qu’il n’y a pas d’arrestations injustifiées ». « Nous interrogeons des personnes pour des infractions qui, à nos yeux, sont constituées », a déclaré un porte-parole, mais « 48 heures (de garde à vue) pour tenter de traiter l’infraction, c’est court », a-t-il ajouté.

Des instructions ont-elles été données pour des arrestations massives ? « Non », a déclaré un haut gradé de la police à l’agence de presse AFP, ajoutant que « lorsque des profils à haut risque sont arrêtés, ils n’agitent plus les autres ». Cependant, avec autant d’interpellations, la « manœuvre est risquée », renchérit un autre policier spécialiste de ces questions. Selon lui, ils « exposent la main-d’œuvre, monopolisent les officiers » et « risquent de radicaliser les manifestants ».

Conclusion

La pratique d’arrestations massives par la police est très controversée. Alors que les policiers disent qu’il n’y a pas d’arrestations injustifiées, les politiciens de gauche, les avocats, les magistrats et les médias dénoncent la garde à vue « arbitraire ». Des centaines de manifestants ont été arrêtés la semaine dernière en France en réponse aux grandes manifestations qui ont éclaté dans tout le pays contre la réforme des retraites du gouvernement. Cette pratique avait déjà été critiquée lors du mouvement des « gilets jaunes ». Amnesty International France a également publié un rapport sur les « arrestations arbitraires » lors d’un rassemblement le 12 décembre 2020 à Paris contre la loi « sécurité mondiale ». Au final, il reste à savoir si cette tactique d’arrestation massive par la police est utilisée simplement pour frustrer le mouvement de protestation.

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