Critique de Medea – Sophie Okonedo est magnifique en tant que femme rebelle par excellence de la Grèce antique | Organiser


MEdéa occupe une place prépondérante dans l’ancien panthéon grec des femmes rebelles : une mère meurtrière et une sorcière complice qui se venge en tuant ses propres enfants. Ce qui est remarquable dans cette production, c’est que l’épouse rejetée de Sophie Okonedo n’est jamais un monstre pur et simple, mais plutôt une figure profondément blessée, hautement stratégique et politique ; un adversaire redoutable de son mari infidèle, Jason, et presque debout dans sa colère. C’est une magnifique prestation.

Il en va de même pour Ben Daniels dans le rôle de Creon, Jason et Aegeus, vers qui elle court pour la sécurité à Athènes. Daniels est superbe dans chaque rôle mais la scène finale, dépeignant le chagrin de Jason, est immense et abjecte.

Ce qui semble être une interprétation formelle et déclamatoire de la pièce devient d’abord psychologique et subtilement subversif entre les mains de Dominic Cooke. La célèbre adaptation de Robinson Jeffers a une qualité épique mais est plus shakespearienne qu’euripidienne dans son rythme et sa poésie; le spectacle dure plus de 90 minutes mais est méditatif plutôt que fiévreux.

Il n’y a pas de concept élevé derrière la production, seulement un drame ancien en tenue moderne. Le décor de Vicki Mortimer est un cercle illuminé à l’extérieur duquel se trouvent les femmes de Corinthe (Jo McInnes, Amy Trigg et Penny Layden). Ils sont les témoins de la violence, assis parmi nous et incapables d’arrêter le grondement du destin. Mais ce sont aussi des voyeurs qui regardent la douleur théâtralisée d’une femme, à laquelle Médée fait référence au début. « Vous êtes venu, laissez-moi supposer… pour scruter mon chagrin », leur dit-elle ainsi qu’à nous.

Ben Daniels dans Médée.
Superbe… Ben Daniels dans Médée. Photographie : Johan Persson

Le son de Gareth Fry fait monter la tension avec des tambours, des hochets, des alarmes et des hélicoptères au-dessus de la tête, tandis que la violence est d’autant plus horrible qu’elle reste invisible. Un escalier menant à un sous-sol permet d’entendre sans les voir les cris des enfants assassinés, tout comme la mort de la nouvelle épouse de Jason, empoisonnée par Médée, est livrée dans un reportage d’une brutalité époustouflante. Les enfants (Oscar Coleman et Eiden-River Coleman lors de la dernière nuit en avant-première) sont angéliques, courant sur scène comme des biches et silencieux.

Pendant ce temps, les personnages de Daniels tournent autour de la scène, torse bombé et musclé, comme s’ils montraient une masculinité héroïque en mouvement, bien qu’ils soient aussi des hommes encerclant leur proie féminine.

Et Médée est ici autant victime que méchante ; une étrangère dans ce pays qui parle des immenses sacrifices qu’elle a faits pour Jason – quittant sa maison, se retournant contre son père et son frère, aidant Jason à rechercher la Toison d’or. Il lui rend ses paroles avec l’arrogance d’un colonisateur. Lui, le mari infidèle qui l’a effectivement laissée face à l’exil, dit qu’il l’a sortie de la sauvagerie de Colchis et l’a amenée à la civilisation en Grèce. Sa nouvelle épouse, la fille de Créon, est mentionnée à plusieurs reprises pour ses cheveux dorés et implicite est le sentiment qu’il a quitté Médée, l’autre exotique, pour faire un « vrai » mariage blanc.

Médée commence la pièce à genoux en suppliant les hommes. Le drame se termine à l’envers, Jason renversé dans la terrible scène finale.

Medea est à @sohoplace, Londres, jusqu’au 22 avril.



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