Des jugements à pouvoir symbolique


Lorsque vous pensez à qui a besoin d’un tutorat en matière de droits de l’homme, la première chose qui vous vient à l’esprit est la Russie. La persécution des membres de l’opposition, la suppression de toute critique, plus la guerre. Et pourtant, on est étonné d’apprendre que la Cour européenne des droits de l’homme ne se laisse pas décourager de statuer sur les poursuites contre la Russie ; en une seule journée de décembre, 35 décisions ont été prises en une seule journée. Car la Russie ne fait plus partie du club. Selon la façon dont vous le lisez, il a quitté le Conseil de l’Europe ou a été rejeté. Alors pourquoi le zèle ? Pour allumer une bougie dans les temps sombres ?

En effet, près de 17 000 affaires russes sont toujours pendantes, avec plus de 1 800 jugements en attente de dommages et intérêts d’un bon deux millions d’euros. En outre, il y a dix millions d’euros d’un procès intenté par la Géorgie, plus les intérêts. Bien sûr, personne n’espère que la Russie de Poutine cédera, comment pourrait-on, face à cette brutalité militaire. Mais le Conseil de l’Europe et son institution phare, la Cour de justice, agissent à la lettre de la Convention des droits de l’homme. De leur point de vue, le retrait de la Russie du 16 mars n’a eu lieu que le 16 septembre – la convention a un délai de préavis de six mois. Donc, ce qui s’est passé jusqu’à ce point atterrit sur la table des juges.

Mais de tels processus fantômes ne sont-ils pas une pure futilité ? D’autant plus que la Cour est notoirement surchargée ? Angelika Nußberger, elle-même ancienne juge à Strasbourg, a mené des entretiens avec des représentants d’organisations non gouvernementales russes pour un rapport de l’OSCE sur les droits de l’homme. Son impression est que les victoires symboliques sont aussi importantes pour ces militants qui sont persécutés par la Russie. En juin, le tribunal a confirmé les poursuites de 73 ONG contre la Russie concernant les lois post-2012 sur les « agents étrangers ». Bien sûr, le verdict est tombé beaucoup trop tard. Mais les représentants des organisations y ont vu une confirmation de leur travail.

Et peut-être ne s’arrête-t-il pas au simple symbolisme. Ce qui frappe dans ce jugement, c’est le montant inhabituellement élevé des dommages et intérêts de plus d’un million d’euros. En attendant, il y a déjà des spéculations quant à savoir si de telles sommes ne pourraient pas à un moment donné être payées à partir d’avoirs russes gelés. Le Conseil de l’Europe lui-même ne poursuit aucun de ces projets. Cependant, selon un porte-parole, il ne veut pas exclure de telles solutions.

Bien sûr, cela s’applique en premier lieu aux procès ukrainiens, qui – en raison du délai de préavis – concernent également la phase depuis le début de la guerre. L’Ukraine elle-même a intenté une action en justice contre la Russie en raison de l’attaque, qui viole le droit international. A cela s’ajoutent les plaintes des citoyens concernés. Comment traiter les avoirs gelés, par exemple s’ils vont dans un fonds, doit être décidé politiquement, dit Nußberger. La Cour ne peut rien y faire. Mais il est également clair que pour pouvoir exécuter un jugement, il faut d’abord l’avoir. Le tribunal continue donc de travailler. A un moment donné, espère-t-on, les arrêts de Strasbourg contre la Belle au Bois Dormant seront peut-être enfin rendus possibles.



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