« Dix milliards, ce n’est pas trop »



interview

Statut : 15/11/2022 18h13

L’experte Rose dit que ce n’est pas le nombre de personnes sur terre qui compte, mais la façon dont elles vivent. Avec les bonnes mesures, dix milliards de personnes peuvent vivre dans le monde. Mais pour que cela se produise, les pays riches en particulier doivent repenser.

tagesschau.de : Maintenant, nous sommes huit milliards de personnes, bientôt il y en aura neuf et finalement dix milliards. Combien de personnes notre planète peut-elle réellement supporter ?

Colette Rose : Au fond, huit ou même dix milliards, ce n’est pas trop pour la planète. Mais ce qui compte vraiment, c’est comment ces gens vivent. Ce n’est donc pas le nombre qui est déterminant, mais la consommation de ces personnes, la quantité d’énergie et de ressources qu’elles utilisent. Par exemple, si tout le monde vivait comme les Américains, nous aurions besoin de cinq Terres. C’est donc une question de durabilité, de comportement et de nutrition qui doit changer, surtout dans les pays industrialisés.

Colette Rose

Le sociologue est chercheur associé à l’Institut de la population et du développement de Berlin et étudie des sujets liés à la démographie internationale. Elle s’intéresse particulièrement à la manière dont l’égalité des sexes et la santé et les droits sexuels et reproductifs peuvent influencer le développement de la population en Afrique.

tagesschau.de : Que signifie une population mondiale aussi nombreuse pour le climat et l’environnement ?

Rose: Cette journée est en fait une journée importante pour rappeler que nous devons investir dans la durabilité. Parce que tout le monde dans le monde ne peut pas vivre comme nous le faisons en Europe et en Amérique. La planète n’est pas d’accord avec ça, surtout dans la perspective du changement climatique. Tout est donc une question d’inégalité. Parce que si nous avons de fortes inégalités mondiales, il sera très difficile de subvenir aux besoins de tant de personnes.

Les pays industrialisés consomment beaucoup plus de ressources que nous n’en avons – cela ne peut pas continuer ainsi, la consommation doit nécessairement être réduite ici. Il faut réfléchir à comment améliorer les conditions de vie des gens sans augmenter l’empreinte écologique. Et on voit déjà que c’est possible.

tagesschau.de : Pouvez-vous donner des exemples ?

Rose: Il y a le phénomène de « leapfrogging ». Il s’agit de faire de grands bonds en avant dans le développement, de sauter des étapes de développement non durables et de mettre directement en œuvre des méthodes plus durables et respectueuses du climat. La numérisation joue ici un rôle majeur, par exemple dans des pays africains comme le Kenya. Il existe une sorte de covoiturage pour les tracteurs via une application, qui est moins cher et plus respectueux du climat que si chaque agriculteur achetait le sien. Cependant, cela peut également signifier que les régions qui ne disposaient pas encore d’une alimentation électrique nationale ne construisent pas de centrales électriques au charbon, mais passent directement aux énergies renouvelables.

tagesschau.de : Penser à l’envers : Quelles sont les conséquences du changement climatique sur la croissance démographique en Afrique, par exemple ? Il y a souvent des famines et des pénuries d’eau là-bas. Cela pourrait-il augmenter les conflits ?

Rose: Bien sûr, il ne peut pas être exclu qu’il y ait des conflits sur la répartition des terres ou de l’eau. Mais il existe aussi des concepts pour sécuriser l’approvisionnement alimentaire des populations, par exemple. Il y a trois grandes choses qui doivent se produire : premièrement, nous devons intensifier l’agriculture existante de diverses manières, telles que de meilleures semences, de meilleurs engrais ou des races résistantes à la sécheresse.

Deuxièmement, il est très important de minimiser le gaspillage alimentaire. Beaucoup est gaspillé en ce moment. Et troisièmement, nous devons nous éloigner des nombreux produits d’origine animale dans notre alimentation, en particulier dans les pays industrialisés. C’est aussi un facteur très important pour la sécurité alimentaire, que le régime alimentaire doit changer. Nous ne pouvons pas manger autant de produits d’origine animale que nous le faisons maintenant à long terme.

tagesschau.de : La population mondiale croissante pourrait-elle également entraîner des mouvements migratoires plus importants ?

Rose: C’est difficile à dire car beaucoup dépend des conditions de vie des populations locales. Mais on peut supposer qu’il y aura plus de migration, même si les chiffres exacts sont difficiles à donner. Mais ce que l’on oublie souvent : l’Allemagne a besoin de l’immigration étrangère. Nous avons la tendance inverse, notre population diminue. C’est pourquoi nous dépendons de l’immigration pour assurer nos besoins en main-d’œuvre qualifiée et financer nos systèmes sociaux.

tagesschau.de : Qu’est-ce qui détermine si une population augmente – comme c’est le cas dans de nombreux pays pauvres – ou diminue – comme on peut l’observer dans de nombreux pays industrialisés ?

Rose: En bref : là où moins de personnes meurent, moins de personnes naissent. L’expérience a montré que la croissance démographique diminue lorsque les conditions de vie des personnes s’améliorent, et surtout lorsque moins d’enfants meurent. Et vous pouvez faire avancer cela en investissant dans des domaines clés qui améliorent à la fois les conditions de vie des gens et réduisent le nombre d’enfants.

Il s’agit en premier lieu de la santé, puis de l’éducation, notamment pour les filles, de la promotion de la femme, de l’égalité des genres et de la création d’emplois. Bien sûr, la planification familiale et la fourniture de contraceptifs jouent également un rôle central, de sorte que les femmes peuvent décider elles-mêmes du nombre d’enfants qu’elles auront.

L’interview a été réalisée par Alexander Steininger, tagesschau.de

Croissance de la population mondiale : la barre des 8 milliards dépassée

Kerstin Breinig, RBB, journal du jour à 17h00, 15 novembre 2022



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