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Robert Zaretsky enseigne à l’Université de Houston et Institut des femmes de Houston. Son dernier livre est « Victoires ne durent jamais: lecture et soins en temps de peste ».
François Rabelais, l’observateur barbelé et débauché de la politique de la foi religieuse dans la France du XVIe siècle, jadis célèbre, l’habit ne fait pas le moine — l’habit ne fait pas le moine. Mais que penserait-il de la politique de la foi républicaine en France aujourd’hui ?
Moins de six mois après les élections présidentielles et législatives du pays, le sans précédent est désormais banal, l’impensable désormais banal.
Le plus grand parti d’opposition à l’Assemblée nationale siège désormais à l’extrême droite de l’hémicycle : le Rassemblement national (RN). Il est dirigé par Marine Le Pen, qui quittera ses fonctions de chef du parti le mois prochain pour se concentrer sur son travail dans les couloirs du Palais Bourbon. Et il y a beaucoup à faire : avec 89 députés, deux vice-présidences et des sièges aux commissions de la défense et du renseignement, jamais un parti d’extrême droite n’a atteint une telle importance dans l’histoire de la France républicaine.
Comme l’a déclaré la porte-parole du RN, Laure Lavalette, « Les autres partis ne peuvent plus faire comme si nous n’existions pas.
Mais même si l’on ne peut s’interroger sur l’existence du RN, on peut s’interroger sur le poids du passé du parti sur son présent et son avenir.
Rappelons-nous la série d’ondes de choc de cette année : d’abord, il y a eu l’élection présidentielle française en juin, alors que le président centriste Emmanuel Macron a vu la marge de sa victoire se réduire considérablement – de 66 % en 2017 à à peine 58 % – tandis que son parti d’extrême droite son adversaire Le Pen est passé de 33 % à plus de 41 %.
Puis, un mois plus tard, ce sont les élections législatives, qui n’ont pas donné la majorité absolue au parti de Macron, le mal nommé Renaissance. Cela a forcé le gouvernement de Macron à négocier – souvent avec peu ou pas de progrès – avec des partis enhardis à la fois de droite et de gauche. Ainsi, la stabilité autrefois assurée par les principes déterminants de la Ve République, fondée sur une présidence forte, est aujourd’hui menacée par un retour aux pratiques douteuses des républiques antérieures, qui s’appuyaient sur un parlement puissant.
Un choc encore plus grand, cependant, fut la répartition des sièges dans l’assemblée. La mauvaise performance des partis traditionnels de gauche – les socialistes, les communistes et les verts – a créé un contraste dramatique avec le nouveau et bruyant gamin du quartier, le radical La France insoumise (LFI). Avec 57 députés, le mouvement du leader LFI Jean-Luc Mélenchon éclipse les rangs parlementaires des autres partis de gauche. Et le souci de pertinence de ces derniers les a convaincus de surmonter leurs hésitations face aux projets et aux personnalités de LFI. Ils siègent désormais à gauche de l’hémicycle en tant que membres de la coalition NUPES, sous un acronyme tout aussi gênant que leur coexistence l’a été depuis.
Comme le constate le politologue Jean-Yves Camus, le RN est désormais bien parti pour notabilisation, ou la respectabilité. Et ce processus a été rendu possible non seulement par les grands partis du pays, mais aussi par les chaînes d’information câblées et télévisées. Les représentants du RN, note Camus, sont devenus incontournables tant dans les médias nationaux que dans les nombreuses stations régionales. Les Français, s’inquiète-t-il, « macèrent » dans ce nouveau breuvage diffusé.
Cela explique en partie la récente crise vestimentaire de l’assemblée au cours cravates aussi bien. Avant que la législature nouvellement élue ne siège en juillet, Le Pen a demandé à ses députés de marquer l’occasion d’une manière démontrant leur « sérieux » – en arrivant en vestes et cravates. Quant aux députés de LFI, beaucoup sont arrivés sans cravate, vêtus de chemises à col ouvert et se promenant dans des sandales à bout ouvert.
Le tohu-bohu qui s’en est suivi était prévisible : les députés de droite, hommes et femmes, ont déploré cet acte d’irrespect envers les institutions républicaines, tandis que, à leur tour, plusieurs femmes de LFI ont dénoncé cet acte de machisme en portant des cravates à la prochaine session lors de cette vénérable Palais-Bourbon.
Bien que cette controverse se soit maintenant apaisée, la manière et le comportement de ces extrêmes opposés ne l’ont pas été. Et si le RN a fait grand cas de son rôle d’« opposition constructive », c’est-à-dire les adultes de la salle, LFI semble déterminé à faciliter d’autant ses démarches en adoptant une position d’« opposition ferme ». Dans la pratique, cela a signifié ralentir les délibérations de la chambre en introduisant des centaines d’amendements à divers projets de loi, en lançant des accusations pendant que les opposants parlaient et en organisant des débrayages avant les votes.
Une étude publiée la semaine dernière par la Fondation Jean-Jaurès suggère que cette stratégie comporte de sérieux risques. Le sondage a révélé que la « dé-diabolisation » du RN se poursuit à un rythme soutenu. À tel point, en fait, que si 61 % des personnes interrogées considéraient le parti de Le Pen comme la plus grande menace pour la démocratie en 2017, ce chiffre a depuis chuté à 57 %.
Et dans le même temps, 57 % des sondés trouvent désormais que c’est la gauche populiste LFI qui fait peser le plus grand danger sur la république. De plus, un plus grand pourcentage de répondants pensent que le RN est mieux placé que la LFI, les socialistes ou les Verts pour gouverner le pays.
Le récent 50e anniversaire de la naissance du Front national – le prédécesseur du RN – souligne le caractère troublant de ce changement de perception du public. En marquant l’anniversaire, Le Pen a cherché à aérographier toute mention du fondateur du parti – son père, Jean-Marie Le Pen – sans parler de l’équipage hétéroclite de collaborateurs nazis et d’insurgés français algériens présents lors de ses débuts.
Cet équipage peu recommandable est parti depuis longtemps, mais comme aurait pu dire Rabelais, la cravate ne fait pas le républicain — la cravate ne fait pas le républicain, ou dans le cas de Le Pen, la tenue de ville ne fait pas le républicain. Les cravates et les costumes ne dissimuleront jamais complètement l’hostilité continue de RN envers les immigrants ou son hospitalité durable envers l’illibéralisme.
Devant ces bouffonneries, Rabelais a peut-être répété un autre vers célèbre : « Baissez le rideau, la farce est jouée.
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