Les deux votes de défiance pour renverser le gouvernement de la Première ministre française Elisabeth Borne ont été rejetés, la maintenant au pouvoir pour le moment. Malgré cela, la crise politique est loin d’être terminée, constatent députés et observateurs. Lundi, le gouvernement français a fait face à deux motions de censure, l’une déposée par le groupe indépendant LIOT et l’autre par le groupe d’extrême-droite, Rassemblement national.
La réforme des retraites est adoptée
La première motion, déposée par LIOT, a échoué par neuf voix, avec 278 voix favorables de l’autre côté de l’allée – le vote de censure le plus proche est venu renverser le gouvernement sous le mandat de Macron. La deuxième motion a échoué par une plus grande marge, avec 94 voix pour – car de nombreux députés refusent de soutenir les motions déposées par l’extrême droite.
Les motions ont été déposées suite à la tentative du gouvernement de faire passer sa réforme controversée des retraites via un mécanisme constitutionnel qui lui permet de contourner un vote à l’Assemblée nationale (article 49.3) et d’adopter le texte de force. En échange, les oppositions peuvent déposer des motions de censure pour renverser le gouvernement et rejeter un tel projet de loi.
Le résultat signifie que le gouvernement reste en place et que la réforme des retraites est considérée comme adoptée. Cependant, la réforme doit d’abord passer divers contrôles de constitutionnalité – à effectuer par le Conseil constitutionnel – suite à des appels de tous les horizons politiques. Le processus pourrait conduire à une invalidation partielle du texte avant sa promulgation.
Une crise politique persistante
Bien que le gouvernement ait survécu de justesse au vote, la crise politique se poursuit. Le député indépendant Charles de Courson, qui a défendu la motion de censure du groupe LIOT, a dénoncé l’attitude du gouvernement, qu’il a décrit comme ayant « usé de toutes les manœuvres possibles […] de tordre les procédures ».
« Ce projet n’a aucune légitimité démocratique », a-t-il déclaré à propos de la réforme des retraites, ajoutant que « nous avons été nombreux à voter pour Emmanuel Macron » [lors de l’élection présidentielle] « par défaut » contre Marine Le Pen. Le député a souligné que c’est la onzième fois en moins d’un an que le gouvernement utilise l’article 49.3 de la Constitution, ajoutant qu’il s’agit à la fois d’un « déni de social-démocratie » et d’une « crise politique et sociale ».
Des sentiments similaires ont été repris par d’autres partis. « Ce qui est légal n’est pas forcément légitime », a déclaré la députée écologiste Cyrielle Chatelain. « Vous n’avez plus les moyens de gouverner un pays en proie à la méfiance depuis les gilets jaunes », a-t-elle lancé, adressée au gouvernement.
A droite, le leader du groupe Les Républicains Olivier Marleix, favorable à la réforme, a déclaré que « le problème aujourd’hui, ce n’est pas la réforme des retraites, c’est le président de la République ». Selon lui, le président Emmanuel Macron et ses gouvernements successifs ont mis en place un « exercice du pouvoir isolé, parfois narcissique et souvent arrogant, comme insensible à la vie des Français et des Françaises », s’inquiétant de la « déconnexion » de Macron avec le pays.
Interrogés par EURACTIV, les députés du parti centriste Renaissance de Macron ont déclaré que pour tourner la page de la réforme des retraites et sortir de la crise politique, il fallait « ouvrir une nouvelle séquence politique » et donner une « direction aux cinq-cinq. terme de l’année ». « Nous sommes dans un moment difficile. Nous devrons discuter au sein de notre groupe, au sein de la majorité présidentielle, sur tout le travail à l’Assemblée qui va suivre », a déclaré Violette Spillebout, députée et porte-parole de Renaissance.
Cependant, Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes, a déclaré que « la conscience politique ne peut pas venir du seul président ». Il a appelé l’opposition à faire preuve de « responsabilité et de bonne volonté ». « Nous réclamons souvent un nouveau [political] culture, mais cela doit aller dans les deux sens », a-t-il ajouté.
Une nouvelle grève a été appelée par tous les syndicats pour jeudi (23 mars). Après le rejet du projet de loi, des parlementaires, notamment de gauche, ont appelé à « continuer le combat » pour obtenir un rejet. La mobilisation dans les rues persiste, les manifestations – à la fois spontanées et à l’appel des syndicats – se poursuivant depuis plus d’une semaine à Paris et dans d’autres grandes villes.
Décryptage de la réforme des retraites françaises
Le projet de loi de réforme des retraites, qui a été à l’origine de la crise politique actuelle, est un sujet complexe et controversé en France. Le texte vise à fusionner les 42 régimes de retraite actuels en un système universel de points, dans le but de rendre le système plus juste et plus équitable.
Parmi les principales mesures proposées, on trouve l’augmentation de l’âge de départ à la retraite (de 62 ans à 64 ans), la suppression des régimes spéciaux de retraite pour les travailleurs du secteur public (comme les cheminots) et l’introduction d’un système à points dans lequel chaque euro cotisé donne droit à des points qui seront ensuite convertis en une pension de retraite.
Les partisans de la réforme soutiennent qu’elle est nécessaire pour garantir la viabilité financière du système de retraite français, qui est actuellement confronté à des déficits importants.
Cependant, de nombreux Français s’opposent fermement à la réforme, arguant qu’elle représente une attaque contre les droits acquis des travailleurs, en particulier ceux des régimes spéciaux. Certains craignent également que la réforme n’entraîne une diminution de leur pension de retraite.
La réforme des retraites a été l’une des pierres angulaires de la présidence d’Emmanuel Macron et a été présentée comme le moyen de garantir la pérennité du régime de retraite français. Cependant, la controverse et la résistance qui ont suivi semblent suggérer que la réforme n’est pas, aussi populaire qu’il l’espérait. Au lieu de cela, cela a exacerbé les inquiétudes existantes quant à la capacité du gouvernement à comprendre les préoccupations de la population française. Les perspectives politiques du gouvernement français restent incertaines à court et à long terme.
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