Le meurtre politique qui secoue Paris

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Le 14 octobre, le corps mutilé d’une adolescente blonde de 12 ans prénommée Lola a été retrouvé plié dans une valise en plastique dans la cour de la cité de sa famille dans le 19e arrondissement de Paris. La cause officielle de la mort de Lola était l’asphyxie, mais les enquêteurs ont également trouvé des signes de torture, notamment des coupures au cou et au visage, et les chiffres 1 et 0 griffonnés, inexplicablement, sur la plante de ses pieds. Elle a peut-être été abusée sexuellement. Ce crime choquant et brutal a dominé l’actualité en France et s’est répercuté sur les médias traditionnels et sociaux de droite bien au-delà de l’Europe. Le principal suspect du meurtre, identifié uniquement comme Dahbia B., est une femme algérienne de 24 ans qui se trouve illégalement dans le pays depuis qu’elle a dépassé la durée de validité de son visa étudiant. Elle était sans emploi, n’avait pas d’adresse fixe et faisait des « rêves éveillés » au cours desquels elle tenait des « propos incohérents », selon sa sœur. Et elle avait reçu un arrêté d’expulsion pas plus tard que le 21 août, lorsqu’elle avait été arrêtée par des douaniers dans un aéroport parisien.

À bien des égards, la réponse à cette atrocité a été prévisible. « Encore une fois, le suspect de cet acte barbare n’aurait pas dû se trouver en France », a déclaré Marine Le Pen, vice-championne à l’élection présidentielle de juin dernier et leader du parti de droite Rassemblement national. a déclaré mardi au Parlement. « Qu’attendez-vous pour agir afin que cette immigration clandestine incontrôlable soit enfin stoppée ?

Le principal rival de Le Pen, l’écrivain et personnalité médiatique Éric Zemmour, dont le parti Reconquête a débordé Le Pen sur la droite, a couronné une semaine d’activisme et de tweets fébriles sur le meurtre avec une manifestation intitulée #ManifPourLola (« Manifestation pour Lola ») en Paris jeudi soir. Parmi les manifestants figuraient « les monarchistes de l’Action française, les jeunes cagoulés et masqués des zouaves violents et le groupe chrétien fondamentaliste Civitas », selon Le Monde. Avant que de fortes pluies et des éclairs n’interrompent le rassemblement, ils ont entonné une interprétation de l’hymne national français tandis que « les cris de ‘Remigration !’ « Mort aux pédophiles ! » et ‘C’est notre maison!’ résonna brièvement, un rappel des affiliations politiques des manifestants.

Les parents de Lola ont demandé que la tragédie ne soit pas transformée en arme politique. Néanmoins, Zemmour, Le Pen et leurs sympathisants ont insisté sur le fait que c’est par respect pour la jeune fille assassinée et sa famille qu’ils refusent de laisser les médias et l’administration Macron échapper à la responsabilité de la crise de l’immigration clandestine. Et dans une certaine mesure, ils ont un point qui demande à être pris au sérieux. « Plus de 62 000 personnes identifiées par les autorités comme étant en France illégalement ont été sommées de quitter le territoire au premier semestre 2021 », Le New York Times signalé. « Mais moins de 6% d’entre eux l’ont fait, et depuis l’élection de M. Macron en 2017, ce chiffre n’a jamais été supérieur à 15%. »

Un pays doit être en mesure de faire respecter l’intégrité de ses propres frontières, et la France ne parvient pas à expulser un nombre suffisant de migrants sans papiers qui entrent illégalement ou, comme Dahbia B., dépassent la durée de leur visa. Affirmer ce fait ne devrait pas être plus controversé que d’insister sur le fait qu’un particulier ne peut jamais prouver un universel : les immigrés, quel que soit leur statut, sont un groupe moralement aussi varié que n’importe quel autre.

Là où le discours est devenu sinistre, c’est dans l’instigation raciale pas du tout subtile. Ces dernières années, le terme fémicide a été popularisé par des campagnes de graffitis pour sensibiliser à la réalité quotidienne de la violence sexiste qui fait rarement la une des journaux. En septembre dernier, Zemmour a forgé un néologisme dérivé : « Le passage à tabac, le viol, le meurtre, l’agression au couteau d’un Français ou d’une Française par un émigré, ce n’est pas un fait divers », a-t-il déclaré à une foule lors de son l’université d’été du parti dans les Alpes-de-Haute-Provence. « Pas plus un fait divers que le meurtre d’une femme par son mari. C’est un fait politique que j’appellerai maintenant « francocide ».

Depuis la mort de Lola il y a une semaine, ce terme ethno a gagné en popularité, en particulier sur les réseaux sociaux, où il est devenu un hashtag populaire, alimenté par l’hypothèse sous-jacente selon laquelle n’importe quel l’agression ou le crime perpétré par un migrant non français contre un Français est intrinsèquement raciste et racialement prédateur. Non énoncée mais clairement voulue est la compréhension correspondante de la francité comme synonyme de blancheur et l’étrangeté comme équivalent à non-blancheur. Comme l’écrivain Raphaël Enthoven a répondu à Zemmour sur Twitter, « La lutte contre les ‘francocides’ serait probablement moins vive si la victime était un musulman français noir et le coupable un catholique polonais blanc. » Bien qu’il soit impossible de prouver un contrefactuel, il est certainement difficile d’imaginer les nationalistes saisissant leurs parapluies et se massant sous la pluie battante pour protester contre cette dernière situation.

Qu’est-ce que le meurtre abyssal d’un enfant de 12 ans – selon toutes les indications aux mains d’une personne gravement troublée– a donc révélé à quel point le recours à des marqueurs identitaires abstraits et à un identitarisme grossier obscurcit au lieu d’éclairer des réalités humaines complexes.



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