Le Credit Suisse secouru par UBS : les obligations AT1 en question
Le secteur bancaire européen a été secoué par une décision historique prise par l’autorité régulatrice suisse des marchés financiers FINMA. Dimanche, UBS a renfloué son rival de longue date, le Credit Suisse, dans le cadre d’un accord de 3 milliards de dollars. Toutefois, la valeur des obligations dites « AT1 » de la banque suisse assiégée a été réduite à zéro suite à l’annonce de la prise de contrôle. Cette décision a provoqué la colère des investisseurs et entraîné plusieurs autres actions bancaires européennes vers le bas.
Dans cet article, nous allons nous pencher sur les obligations AT1 et sur les raisons pour lesquelles leur annulation pourrait alimenter de nouvelles turbulences sur les marchés financiers.
Que sont les obligations AT1 ?
Les obligations AT1, également connues sous le nom d’obligations convertibles contingentes ou CoCos, ont émergé comme nouvel actif à revenu fixe après la crise financière de 2008. Il s’agit d’un type d’obligation plus risqué qui offre un rendement plus élevé que les actifs considérés comme plus sûrs, comme la dette publique. Par exemple, alors que les rendements des bons du Trésor américain à 10 ans se situent actuellement autour de 3,58%, les CoCos du Credit Suisse avaient un taux de coupon de 9,75%.
Les AT1 sont également des obligations hybrides, ce qui signifie que la banque peut choisir de les convertir en actions si sa santé financière tombe en dessous d’un certain niveau. Cela sert à soutenir les niveaux de capital de la banque et à réduire sa dette en temps de crise.
Que s’est-il passé au Credit Suisse ?
La FINMA a déclaré dimanche qu’elle écrirait la valeur des AT1 du Credit Suisse à zéro, anéantissant ainsi des actifs d’une valeur de 16 000 milliards de francs suisses (17 milliards de dollars) du jour au lendemain. Les détenteurs d’obligations sont généralement mieux classés que les actionnaires en ce qui concerne le remboursement du capital. Mais les propriétaires de Credit Suisse CoCos n’ont plus rien après la décision de la FINMA, tandis que les actionnaires ont la possibilité de vendre leurs actions à UBS pour environ 0,70 franc suisse (0,76 $) dans le cadre de l’accord de reprise.
Le cabinet d’avocats Quinn Emanuel a déclaré lundi qu’il avait constitué une équipe d’avocats et s’adressait aux détenteurs d’AT1 au sujet d’éventuelles poursuites judiciaires concernant la décision de la FINMA. Mais il pourrait s’agir d’une mauvaise interprétation des petits caractères, car les CoCos du Credit Suisse étaient spécialement structurés de manière à permettre au régulateur de les réduire à zéro aux frais des investisseurs.
Est-ce déjà arrivé ?
Oui, mais très rarement et jamais auparavant impliquant une banque de la taille du Credit Suisse. Le parallèle le plus proche avec la décision de dimanche de la FINMA est survenu lorsque la Banco Popular espagnole s’est effondrée en 2017, bien que les actionnaires et les détenteurs d’obligations AT1 aient tous deux été anéantis dans le cadre de son sauvetage par son rival Banco Santander. Un groupe de détenteurs d’obligations CoCo a alors demandé à Quinn Emanuel d’intenter une action en justice en leur nom, bien qu’ils aient échoué dans leur tentative de poursuivre le régulateur.
En quoi est-ce important ?
L’annulation par la FINMA des obligations du Credit Suisse a fait chuter les obligations AT1 des banques européennes, les investisseurs prenant en compte le risque que leurs avoirs soient annulés par les régulateurs. L’ETF AT1 Capital Bond ETF d’Invesco, un fonds qui suit le secteur, a plongé de 14% à l’ouverture des marchés lundi, bien qu’il ait réduit certaines de ces pertes et terminé la séance de négociation un peu moins de 5% plus bas. Les actions des grandes banques comme BNP Paribas, Santander et même UBS ont également chuté lundi.
Il pourrait devenir plus difficile pour les banques de lever des dettes si les investisseurs hésitent à acheter des obligations CoCo, qui représentent un marché de 260 milliards de dollars l’année dernière, selon les données du Financial Times. Cela augmente le risque que la décision de la FINMA prolonge la crise bancaire qui sévit sur le continent après le sauvetage du Credit Suisse par UBS.
En conclusion, l’accord historique qui a vu UBS secourir son rival Credit Suisse a eu des répercussions sur les obligations AT1 et pourrait impacter la santé financière des banques européennes. Les investisseurs craignent désormais que leurs avoirs soient annulés par les régulateurs, ce qui pourrait rendre difficile la levée des dettes pour les banques à l’avenir. Les mois à venir seront cruciaux pour déterminer si cette décision de la FINMA provoquera ou non une nouvelle crise financière sur le continent.
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