Forer dans un volcan pour atteindre le magma représente une opportunité unique pour la recherche géologique. Yan Lavallée et ses collègues visent une profondeur de 900 degrés Celsius pour collecter des données précieuses. Des études récentes remettent en question l’idée traditionnelle des chambres magmatiques, suggérant qu’elles sont plutôt composées de matériaux cristallisés avec peu de magma. Ce changement de perspective pourrait transformer notre compréhension du volcanisme et favoriser l’innovation dans l’exploitation de l’énergie géothermique.
L’idée de forer dans un volcan pour atteindre du magma peut sembler audacieuse, voire risquée. Yan Lavallée, professeur de pétrologie magmatique, la considère comme une « opportunité spectaculaire » pour faire progresser la recherche en géologie. En collaboration avec des collègues, il projette de percer jusqu’à une profondeur où la température atteint environ 900 degrés Celsius. Les données recueillies pourraient bénéficier à de nombreux professionnels, allant des géologues souhaitant approfondir leurs connaissances sur le volcanisme aux ingénieurs intéressés par l’utilisation de roches très chaudes ou de magma pour la production d’énergie géothermique.
Imaginer une chambre magmatique
Les chercheurs souhaitent explorer une chambre magmatique, mais à quoi cela ressemble-t-il vraiment ? L’idée traditionnelle évoque un espace vide où le magma bouillonne comme dans une grande casserole, une image souvent véhiculée par des illustrations scolaires. En effet, ces graphiques montrent une grande bulle rouge, étiquetée « chambre magmatique », située en profondeur, avec des émanations de fumée à la surface.
Cependant, des recherches récentes remettent en question cette représentation simpliste. Les études suggèrent qu’à grande profondeur, ce ne sont pas de vastes poches de magma liquide qui dominent, mais plutôt un matériau déjà cristallisé, avec une fusion liquide en quantité réduite et répartie dans de petites poches. Il semble également que la transition entre le magma et la roche environnante soit bien plus graduelle que ce que les images classiques laissent penser.
La dynamique du magma
Allen Glazner, expert en volcanologie, soutient qu’il n’existe probablement pas de vaste chambre magmatique pleine de magma à la profondeur ciblée par le projet Krafla Magma Testbed (KMT). Selon lui, pour maintenir le magma à l’état liquide dans la croûte terrestre supérieure, entourée de roches plus froides, un apport régulier de chaleur provenant de profondeurs plus importantes est essentiel. « Cela n’est viable que si du nouveau magma remonte des profondeurs », explique-t-il.
Glazner souligne que, sans cet apport de magma, la croûte terrestre ne pourrait pas continuer à s’épaissir comme le prévoient certains modèles. En réalité, ce que l’on observe dans les études sismiques ce sont des zones où les ondes se déplacent plus lentement, souvent interprétées comme des chambres magmatiques, mais qui pourraient ne contenir que quelques pourcents de magma parmi des cristaux solides. Ainsi, la montée du magma n’est possible que lorsque cette proportion dépasse 50 %, ce qui n’est le cas que dans de petites zones spécifiques.
Ce changement de perspective sur la nature des chambres magmatiques pousse la communauté scientifique à adopter un modèle plus nuancé, où l’on parle davantage de « réservoirs de magma » interconnectés, plutôt que de grandes poches distinctes. Ces réservoirs se trouvent à des profondeurs variées et sont souvent de courte durée, sauf dans les cas d’activité volcanique prolongée où des réservoirs durables peuvent se former.
En somme, l’exploration des profondeurs volcaniques pourrait remettre en question notre compréhension actuelle du volcanisme et ouvrir de nouvelles avenues pour la recherche géologique et l’exploitation de l’énergie géothermique.