Une récente offensive israélienne sur Qamichli a intensifié la crise dans le nord de la Syrie, marquée par des explosions et des tensions croissantes. Les Kurdes, inquiets de l’impact des forces islamistes et de l’État islamique, renforcent leurs défenses. La Turquie, sous Erdogan, cible les milices kurdes, tandis que les États-Unis soutiennent les Forces démocratiques syriennes. La présence russe complique davantage la situation, avec des dialogues potentiels entre Kurdes et la milice HTS en cours.
Une atmosphère de tension palpable. Des explosions retentissantes. Et des véhicules incendiés. Un récent survol des zones kurdes met en lumière la crise qui sévit dans le nord de la Syrie, exacerbée par l’intervention militaire de plusieurs acteurs.
Soudain, des éclats lumineux orange percent l’obscurité du ciel nocturne, suivis de détonations répétées. Il est évident qu’une série d’explosions secoue un dépôt de munitions situé dans la ville de Qamichli, au nord-est de la Syrie. Sur la terrasse de l’hôtel, journalistes et employés se rassemblent pour observer l’assaut.
Peu après, la situation s’éclaircit : il s’agit d’une offensive de l’aviation israélienne ciblant l’aéroport de Qamichli, récemment abandonné par les soldats de l’ancien régime de Bashar al-Assad, qui ont fui vers l’Irak.
Les frappes israéliennes et la tension croissante
D’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme basé à Londres, Israël aurait frappé plus de 300 installations militaires depuis le week-end dernier. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu semble profiter du désordre qui suit la montée au pouvoir des milices islamistes pour affaiblir l’influence militaire en Syrie.
Depuis la chute du régime Assad, les attaques israéliennes contre des cibles en Syrie se sont intensifiées, ajoutant une couche de complexité à la situation déjà volatile.
Les Kurdes en état d’alerte
Les Kurdes de Qamichli vivent dans l’angoisse face à cette nouvelle donne militaire. Dimanche, ils ont abattu plusieurs statues d’Assad sur les places publiques, mais leur euphorie a été de courte durée.
De nombreux postes de contrôle dans la région autonome kurde du nord-est de la Syrie ont été consolidés. Les jeunes combattants armés affichent une nervosité palpable.
La crainte que des forces islamistes ou des membres de l’État islamique infiltrent la région kurde et perturbent l’autogestion démocratique par des attaques reste omniprésente. Des attentats-suicides sont encore à l’ordre du jour.
De plus, à l’ouest du pays, des milices islamistes de l’armée nationale syrienne (SNA) s’attaquent directement aux troupes des Forces démocratiques syriennes (SDF) dominées par les Kurdes dans la région de Manbij.
La Turquie, qui a accueilli des millions de réfugiés syriens, se demande quelles seront les conséquences de ce changement de pouvoir pour sa propre stabilité.
Erdogan et ses ambitions
La SNA bénéficie du soutien turc depuis plusieurs années, notamment depuis que l’armée turque a pris le contrôle de certaines zones frontalières syriennes dominées par les Kurdes en 2018 suite à des frappes aériennes illégales.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan considère la milice kurde YPG, pilier des SDF, comme une branche du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qu’il combat avec fermeté sur le sol turc. Il profite de la chute d’Assad pour intensifier ses offensives contre les forces kurdes.
Des responsables turcs qualifient les Kurdes de ‘terroristes’, les associant ainsi à l’organisation terroriste ‘État islamique’ (EI), qui continue de sévir à partir de refuges en Syrie, exploitant le vide de pouvoir actuel.
L’Iran, quant à lui, a perdu son plus proche allié en Syrie avec la chute d’Assad, et les réactions de Téhéran témoignent d’une certaine désorientation.
Conflits d’intérêts au sein de l’OTAN
Un affrontement entre deux alliés de l’OTAN se déroule au grand jour : alors que la Turquie cible les Kurdes pour des raisons internes, les États-Unis œuvrent pour mettre fin aux attaques des milices d’Erdogan et bombardent à leur tour des positions de l’EI en Syrie centrale, en collaboration avec les SDF. Environ 900 soldats américains sont stationnés près de Deir ez-Zor.
Cette situation compliquée incite les Kurdes à envisager leur avenir avec une inquiétude grandissante. L’avenir de leur autogestion démocratique, où l’égalité des sexes est prônée au sein de l’armée et de l’administration, demeure incertain.
La présence russe dans le paysage syrien
À l’aéroport de Qamichli, l’atmosphère reste tendue après les récentes frappes israéliennes. Des troupes russes y sont déployées, supervisant la région frontalière en coordination avec les Kurdes.
Des avions de transport russes sont stationnés aux abords de la piste. Il est probable que les autorités russes aient été informées des plans d’attaque israéliens, du moins rien ne laisse penser le contraire à l’entrée de l’aéroport.
Plus loin, des camions de l’armée syrienne, réduits en cendres, gisent sur la route. Une odeur de caoutchouc brûlé et de métal se propage dans l’air, témoignant de la destruction causée par Israël.
Des civils fouillent les débris à la recherche de ce qui pourrait rester. Pendant ce temps, des combattants kurdes sécurisent la zone, tentant de remettre de l’ordre après le chaos nocturne.
‘La Russie est à vos côtés’, assure un camion de l’armée russe dans la région de Qamichli. Cependant, comme l’histoire l’a montré, la situation peut rapidement évoluer.
Dialogues potentiels avec la HTS
Actuellement, la Russie, les États-Unis, Israël et la Turquie mènent des opérations militaires en Syrie, chacun poursuivant ses propres objectifs. Cela inclut également les différentes milices qui doivent collaborer pour établir un nouveau gouvernement en Syrie.
Le leader de la milice HTS, Muhammed al-Jolani, tente d’adopter une approche conciliatrice pour rassembler tous les groupes ethniques. Cependant, de nombreux Kurdes à Qamichli demeurent sceptiques quant à sa capacité à réussir.
Des discussions se déroulent probablement en coulisses entre les dirigeants kurdes et al-Jolani. Les deux parties cherchent sans doute à établir un dialogue pour naviguer dans cette période tumultueuse