Trump oscille entre romantisme et pressions : Poutine nourrit des espoirs de victoire.

La vision géopolitique de la Russie s’est clarifiée récemment, avec des critiques acerbes des États-Unis par Poutine, perçus comme des colonisateurs. L’échange entre Trump et Poutine indique un rapprochement inattendu, où les États-Unis semblent adopter des narrations russes. Trump se positionne comme médiateur, mais exerce une pression sur l’Ukraine, ce qui pourrait renforcer la position de la Russie. Les répercussions sur l’Europe et la sécurité continentale sont préoccupantes, alors que Poutine vise un nouvel ordre de sécurité.

Il y a quelques semaines, la vision géopolitique de la Russie était claire. Lors de sa conférence de presse annuelle en janvier, le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a exprimé que ceux qui défendaient l’ordre international établi après la guerre, tel que défini par Yalta et Potsdam, ainsi que par la Charte des Nations Unies, se trouvaient en opposition à ceux qui, depuis l’effondrement de l’Union soviétique, s’efforcent d’imposer leur propre cadre de règles, négligeant ainsi le droit international et l’égalité entre les États. Il est évident pour lui que la Russie appartient à la première catégorie, tandis que les États-Unis sont perçus comme appartenant à la seconde.

Le président Vladimir Poutine a souvent été plus radical dans ses critiques, désignant les États-Unis comme responsables de nombreux problèmes mondiaux, les qualifiant d’exploiteurs et de colonisateurs qui cherchent à imposer leur ordre politique et économique au reste du monde. De plus en plus de nations, à l’instar de la Russie, s’opposent à cette hégémonie, réaffirmant leur souveraineté et se regroupant sous ce qu’ils appellent la « majorité mondiale ». Le « collectif occidental », dirigé par les États-Unis, est en déclin, bien que cela soit difficile à admettre pour certains.

Les États-Unis et les récits russes

Le récent échange téléphonique entre Donald Trump et Poutine, ainsi que le rapprochement rapide entre les États-Unis et la Russie, ont ébranlé des convictions profondément ancrées. Les responsables et les propagandistes russes ont été surpris de constater à quelle vitesse les opinions des politiciens américains sur la Russie et l’Ukraine semblent s’aligner sur les narrations russes. Sous l’administration Trump, les États-Unis ont voté à l’ONU aux côtés de nations comme la Russie et la Corée du Nord, soutenant une résolution qui minimise la crise ukrainienne, tout en critiquant ouvertement l’Ukraine et en humiliant son président.

Le ministre des Affaires étrangères, Marco Rubio, a même qualifié le conflit en Ukraine de « guerre par procuration » entre les États-Unis et la Russie, ce qui diminue l’autonomie de l’Ukraine face à l’agression russe et correspond parfaitement à la perception russe. L’ennemi principal n’est plus les États-Unis, mais l’Europe, marquant une décomposition du « collectif occidental » sous l’œil attentif de Moscou. L’Europe est désormais perçue comme le fauteur de guerre, tandis que l’Amérique pourrait devenir un partenaire politique et économique potentiel.

Cependant, l’avenir reste incertain. On ne sait pas comment Trump envisage les négociations de paix entre la Russie et l’Ukraine, ni si sa nouvelle approche envers la Russie sera durable, ce qui laisse le Kremlin sur ses gardes. Malgré tout, la situation actuelle semble offrir à la Russie des opportunités stratégiques, bien que celles-ci puissent se transformer en illusions passagères.

Pression sur l’Ukraine

Trump se positionne comme un médiateur neutre pour un éventuel accord entre la Russie et l’Ukraine, mais ses préférences sont claires : il estime que des avancées sont possibles avec Poutine, qui souhaite mettre fin au conflit. En revanche, l’Ukraine, conduite par le président Zelenski, complique la situation pour lui, ne lui offrant aucune marge de manœuvre.

En utilisant des tactiques d’extorsion, Trump pousse l’Ukraine vers la table des négociations, tout en renforçant la position de départ des Russes en suspendant l’aide militaire et en fournissant des informations de renseignement. Pour l’instant, Moscou ne montre aucune intention de céder, Poutine affirmant qu’il n’est pas prêt à faire des concessions. Si un accord favorable à Poutine se concrétise, impliquant de sévères pertes pour l’Ukraine, ce serait une victoire éclatante pour le Kremlin, considérant l’ampleur de la résistance ukrainienne et les pertes subies.

L’Europe face à la défaite

Un tel résultat constituerait également une « victoire » sur l’Occident, qui a soutenu l’Ukraine tant militairement que moralement, espérant affaiblir la Russie à travers des sanctions économiques historiques. Cette victoire renforcerait la position de Poutine sur la scène intérieure et face à une Europe qui résiste à la politique pragmatique de Trump. Toutefois, cela nécessiterait des concessions américaines plus significatives. Poutine a toujours indiqué qu’il vise plus que l’Ukraine, aspirant à un nouvel ordre de sécurité qui pourrait inclure le retrait de l’OTAN de l’est de l’Europe, laissant ainsi le continent à la merci des intérêts sécuritaires russes.

Pour la première fois, Trump semble ouvrir la voie à une telle dynamique. Il soulève des doutes sérieux sur l’engagement américain envers la sécurité européenne, considérant que les Européens devraient assumer leurs propres responsabilités, ce qui crée des lignes de fracture exploitables pour la Russie. Si Poutine souhaite tester ses limites, notamment dans la région de la mer Baltique, il pourrait avoir la capacité d’influencer les frontières sous de telles conditions. L’acceptation par Trump de zones d’influence contraignantes, comme le souhaite la Russie, constituerait un succès majeur pour Poutine, avec des répercussions potentiellement graves pour l’Europe, notamment en matière de domination politique sur le continent.