Une chaîne de télévision française lance une enquête sur l’ingérence externe dans le contenu


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PARIS — La chaîne d’information française BFM TV a lancé une enquête sur des contenus diffusés sans vérification éditoriale appropriée, ce qui a conduit à des soupçons d’ingérence intentionnelle par un pays étranger.

Au moins un élément de contenu concerne le Maroc, POLITICO a appris de plusieurs sources internes.

Une dizaine de contenus suspects ont été identifiés. Selon une source proche de l’enquête, la direction soupçonne également l’influence d’autres États étrangers.

Des clips vidéo et des commentaires qui n’ont pas été soumis via les canaux de validation habituels ont été diffusés lors d’un programme d’information nocturne, a annoncé la chaîne de télévision jeudi après que POLITICO a révélé l’histoire.

La direction de la chaîne soupçonne qu’il s’agit du résultat d’une intervention extérieure, dont l’origine reste floue.

Des auditions ont eu lieu avec les collègues de l’animateur Rachid M’Barki, qui n’est plus à l’antenne depuis la mi-janvier.

« Une enquête interne a été ouverte il y a deux semaines suite à une information reçue concernant un journaliste de notre chaîne », a indiqué Hervé Beroud, responsable de l’information d’Altice Media, le groupe de médias propriétaire de BFM TV. « Ce journaliste est en congé depuis le début de cette enquête et pour toute la durée de cette enquête. BFM est probablement victime dans cette affaire et nous ne pouvons tolérer aucun soupçon sur le travail de l’ensemble de notre rédaction et de nos 300 journalistes. »

Contacté par POLITICO, M’Barki a déclaré avoir « utilisé des informations qui [he] reçus des sources » et qu' »ils n’ont pas nécessairement suivi le processus éditorial habituel ».

Le journaliste a nié toute faute intentionnelle : « Elles étaient toutes réelles et vérifiées. Je fais mon travail… Je n’exclus rien, peut-être que j’ai été trompé, je n’avais pas l’impression de l’être ou de participer à une opération de Je ne sais pas quoi sinon je ne l’aurais pas fait », a-t-il déclaré.

Plusieurs membres de la rédaction ont en tête un reportage, présenté par M’Barki, sur le forum économique de Dakhla, une ville du sud du Maroc où, selon lui, des investisseurs espagnols se sont réunis en juin 2022 — El Confidencial, un média espagnol, a rapporté que n’était pas le cas.

Sur fond d’images promotionnelles de l’événement, l’animateur évoque le « réchauffement des relations diplomatiques » entre l’Espagne et le Maroc, facilité, dit-il, par la « reconnaissance espagnole du Sahara marocain ». C’est une expression inhabituelle dans les médias français pour désigner la situation du Sahara Occidental, au cœur d’une grave crise diplomatique entre le Maroc et l’Algérie. Le Maroc fait pression sur la France pour qu’elle s’éloigne de la position de neutralité qu’elle a jusqu’ici préféré adopter sur la question.

En juillet 2019, M’Barki a été invité à une célébration du 20e anniversaire de l’accession au trône du roi du Maroc. Le journaliste, d’origine marocaine, s’est exprimé sur ses liens avec le pays dans une interview vidéo mise en ligne par le site marocain Le 360, média considéré comme proche de la monarchie.

Interrogé sur son implication dans la relation France-Maroc, y compris une éventuelle implication dans des associations caritatives, le journaliste a déclaré vouloir « rester très discret là-dessus », ajoutant : « J’essaie d’agir à ma manière à mon petit niveau pour faire briller le Maroc ». . »

Le directeur général de la chaîne, Marc-Olivier Fogiel, a parlé mi-janvier à certains représentants de la rédaction de l’audit interne, avant de le faire connaître plus largement au sein de la rédaction, où il fait l’objet d’intenses spéculations, notamment sur une éventuelle implication d’États étrangers.

La nouvelle survient alors que le scandale du Qatargate secoue le Parlement européen et soulève des questions sur d’éventuelles ramifications supplémentaires dans les capitales européennes.

« J’ai eu très peu de détails, juste qu’il y avait une enquête en cours, une possible ingérence d’un Etat étranger et qu’un contenu a été diffusé qui n’aurait pas dû l’être », a déclaré un membre de la société des journalistes, l’organisme qui représente la rédaction.

Beroud, le dirigeant du groupe Altice, a refusé de commenter une éventuelle ingérence étrangère mais a déclaré que le groupe de médias était prêt à prendre « toutes les mesures tant juridiques, judiciaires, individuelles qu’organisationnelles si nécessaire, en fonction des résultats de cette enquête ».

L’ambassade du Maroc à Paris n’a pas répondu à une demande de commentaire.

Cet article a été mis à jour.





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