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Venant d’Afghanistan, d’Afrique, du Moyen-Orient, des centaines de personnes viennent chaque matin frapper à la porte du bureau des réfugiés à Bruxelles, pour demander l’asile en Belgique.
Débordée, la centrale d’enregistrement de Fedasil, qui traite les demandes d’asile, ne peut plus faire face. Les organisations humanitaires tirent la sonnette d’alarme.
« Vous voyez, les personnes qui dorment ici sont souvent des personnes qui ont essayé d’entrer hier et avant-hier, mais n’ont pas pu », explique Helene Asselman, coordinatrice de Vluchtelingenwerk Vlaanderen. « Ils doivent revenir demain ou après-demain. En attendant, ils n’ont aucun droit en Belgique, ils n’ont aucun statut, ils ne sont pas des résidents légaux. Même les personnes qui ont déjà fait une demande n’ont pas accès aux refuges. Surtout les hommes célibataires. »
« Nous sommes dans un état psychologique difficile », explique Muhammad Mahani, un demandeur d’asile palestinien. « Nous sommes en Belgique depuis quatre mois et ils ne nous ont pas donné de logement, ni de carte SIM. Nous vivons dans ce froid glacial. Nous avons immigré pour construire notre avenir. Mais ce que nous avons vu dans notre pays, nous le voyons ici maintenant. »
Situation sanitaire préoccupante
A quelques mètres du centre de demande d’asile, l’association Médecins Sans Frontières a installé des cliniques mobiles, les mêmes qu’elle utilise dans les zones de guerre.
« Il y a une situation sanitaire qui est assez préoccupante », déclare David Vogel, Advocacy Officer de Médecins Sans Frontières. « Il y a une épidémie de gale qui est difficile à contrôler à Bruxelles puisque les gens, sans logement, retournent dans leur squat le soir , ou dans la rue. Nous avons également eu 17 cas suspects de diphtérie, dont trois ont été confirmés par les laboratoires. Il y a une détérioration très importante de la santé mentale de ce public. Avec une exposition prolongée à la rue, en plus de parcours migratoires difficiles, ponctués de violences et de privations. Et donc, nous voyons vraiment une détérioration dans ce domaine, ce qui est également assez inquiétant. »
A l’heure des repas, des files d’attente se forment autour du soi-disant Hub Humanitaire, un point focal d’aide géré par des ONG et des collectifs citoyens, dans une autre partie de la ville. La situation ne cesse de s’aggraver, raconte l’un des coordinateurs.
« Nous assurons en moyenne 1.000 à 1.200 repas par jour, contre environ 800 personnes il y a un an », indique Clothilde Bodson, coordinatrice opérationnelle au Brussels Humanitarian Hub.
« Nous offrons des services spécialisés tels que des bilans médicaux, des suivis psychologiques, la distribution de vêtements, etc. Il y a différentes réponses de la société civile et des acteurs humanitaires, mais cela ne suffit pas. Nous répondons en réalité aux besoins en raison des carences de l’État, et cela ne fonctionne tout simplement pas. »
Des centaines de personnes obligées de dormir dehors
Chaque soir, les humanitaires multiplient les rondes à travers la ville pour venir en aide aux centaines de personnes contraintes de dormir dehors. La crise est telle que même les réfugiés ukrainiens, qui ont un statut particulier en Belgique comme ailleurs en Europe, sont de plus en plus nombreux à être laissés pour compte.
Comme ces femmes, que l’on rencontre à la Gare du Midi, en plein cœur de Bruxelles.
« Je dois voyager entre différents endroits », explique Liubov Skvorets, un réfugié ukrainien. « Afin de passer des nuits dans des abris temporaires. Mais la situation est telle dans ces refuges, qu’on ne peut y passer que la nuit. Et puis tu n’as plus qu’à prendre tes affaires, et passer à un autre endroit »
« Quand j’ai reçu mon inscription, raconte Tetiana Makukha, elle aussi récemment arrivée d’Ukraine. Bien que je leur ai montré des documents attestant que j’ai un cancer, ils m’ont hébergé pour une nuit dans une auberge du centre-ville. Une seule nuit. Je suis resté ici à la gare pendant toute une semaine. »
« Le chiffre que nous donne la Croix-Rouge, c’est qu’en moyenne, chaque jour, il y a une centaine d’Ukrainiens qui arrivent ici à la gare du Midi », raconte Magali Pratte du Samusocial Bruxelles. « Et sur 100 personnes, il y a une quarantaine ou une cinquantaine qui ont vraiment besoin d’un logement, qui n’ont pas de solution par eux-mêmes. Et sur ces 40 personnes, il y a 20 personnes très vulnérables, avec des enfants ou des femmes enceintes, des personnes handicapées ou des personnes malades. Mais à qui on dit maintenant qu’il n’y a plus de place d’hébergement. Et donc les gens continuent de partir et de revenir, de partir, de revenir. C’est comme ça que ça se passe de nos jours. »
Demandeurs de protection internationale
Les humanitaires continuent leur tournée, cette fois parmi les demandeurs de protection internationale. Comme ici, au pied d’un des centres d’hébergement de l’agence en charge des demandeurs d’asile. Les équipes de la Croix-Rouge belge sont également sur le terrain.
« Nous avons mis en place des tournées supplémentaires, car il y a plus de besoins », explique Morgane Senden de la Croix-Rouge belge. « Nous voyons que les gens ont vraiment besoin de plus d’aide que nous ne pouvons leur en donner. Parce que nous n’apportons pas grand-chose, juste du café, du thé et un peu de nourriture »
Beaucoup dorment sur des matelas à même le sol, sans aucune protection. Leurs tentes de fortune sont régulièrement démontées par la police et des groupes dispersés.
Ici, comme aux Pays-Bas, ou en France et dans le sud de l’Europe, les demandeurs d’asile paient aussi le prix d’une politique migratoire européenne défaillante. Repoussées par certains Etats de l’UE, elles souffrent dans d’autres d’une gestion dysfonctionnelle des demandes d’asile.
L’Etat belge condamné
En désespoir de cause, des groupes de migrants ont occupé des bâtiments vides. Un squat dans un immense bâtiment qui est passé d’environ 200 personnes à plus de 600 en l’espace de quelques jours.
Marie Doutrepont représente plusieurs des occupants du squat, menacés d’expulsion, au sein d’un collectif d’avocats qui se mobilisent sans relâche pour la protection internationale.
« Depuis un an, Fedasil et donc à travers Fedasil, l’Etat belge, a été condamné 7000 fois par le tribunal du travail », raconte-t-elle. « Qui a dit qu’il fallait respecter la loi et héberger ces personnes, avec des jugements auxquels Fedasil ne s’est pas conformé, ou avec des délais tels que cela n’a plus de sens. » Les avocats se sont rendus devant la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg, qui vient d’ordonner des mesures provisoires et l’a confirmé en disant que la loi doit être respectée et que ces personnes doivent être mises à l’abri, et que ne pas le faire, c’est les soumettre à des traitements inhumains et dégradants. Déplacement de l’État ! »
Nasrullah était un soldat en Afghanistan. Il travaillait à la prison de Bagram. Certains membres du nouveau gouvernement taliban y étaient détenus avant qu’ils ne prennent le pouvoir. Sa vie est désormais menacée. Tout comme celle de Jean de Dieu, pasteur au Burundi et militant des droits de l’homme.
On les retrouve tous les deux plus tard, aux côtés d’autres compagnons d’infortune, venus participer à la manifestation organisée par leurs avocats, non loin du secrétariat d’Etat à l’Asile et à la Migration.
« A quoi bon enfiler nos toges d’avocats », lance l’avocate Manon Libert. « De travailler sur nos dossiers, d’aller plaider, de gagner des procédures et de faciliter les jugements si l’Etat piétine ensuite cela, et laisse délibérément des femmes, des enfants et des hommes dans la rue ! Nous demandons donc aujourd’hui à la Belgique de remplir ses obligations internationales ! »
Le Secrétariat d’Etat à l’Asile et à la Migration, ainsi que l’agence chargée de l’accueil des réfugiés, ont refusé mes demandes d’entretien.
Invoquant un manque de moyens, le gouvernement pointe également du doigt l’absence de solidarité européenne. Des arguments que les manifestants jugent intenables, compte tenu de l’urgence.
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