Le réalisateur explore les impacts de la désinformation dans son docufiction sur Werner Herzog à l’aube d’une ère Trump.

Le réalisateur explore les impacts de la désinformation dans son docufiction sur Werner Herzog à l'aube d'une ère Trump.

Piotr Winiewicz, réalisateur de « About a Hero », aborde les défis de l’intelligence artificielle dans le cinéma, suscitant un débat sur l’avenir de la technologie et de la créativité. Ce docufiction, centré sur une enquête inspirée par Werner Herzog, mêle fiction et témoignages d’artistes, tout en explorant des thèmes éthiques et technophobes. Winiewicz cherche à ouvrir un dialogue sur l’IA et ses implications, tout en soulignant l’importance de s’adapter aux évolutions technologiques dans l’industrie cinématographique.

Exploration des Défis de l’IA dans le Cinéma

Piotr Winiewicz, le réalisateur, est pleinement conscient des débats houleux entourant l’intelligence artificielle (IA) dans le milieu cinématographique. Toutefois, il aspire à ce que son premier long-métrage, « About a Hero », qui sera projeté en ouverture de l’IDFA, dépasse ce discours pour susciter une conversation essentielle sur l’avenir de la technologie en lien avec l’art et la créativité.

« About a Hero » se présente comme une œuvre innovante de docufiction, prenant son envol lorsque Winiewicz et son équipe tentent de créer un outil d’IA capable d’imiter le style du célèbre cinéaste allemand, Werner Herzog. L’intrigue, inspirée du texte généré par le programme, se concentre sur l’enquête de Herzog concernant la mort mystérieuse d’un ouvrier dans une petite ville. Ce récit fictif s’entrelace avec des interviews d’artistes, de philosophes et de scientifiques, et met en vedette l’actrice renommée Vicky Krieps, originaire du Luxembourg et d’Allemagne.

Un Scepticisme Constructif envers l’IA

Winiewicz déclare : « Mon intention n’était pas d’intégrer l’IA comme un outil de réalisation cinématographique. » Au contraire, il voulait exprimer un certain scepticisme à son égard. « Lorsque j’ai entamé ce projet en 2018, mon objectif était de créer une œuvre apolitique, mais l’IA est devenue un sujet brûlant, surtout dans le domaine du cinéma, ce qui m’a naturellement préoccupé. »

Il précise également : « Ma plus grande inquiétude concernait davantage les gros titres que la réception du film lui-même. Ce n’est pas un film généré par l’IA, et l’idée est de voir ce qui se passe lorsque quelqu’un essaie de manipuler votre image. » En s’inspirant des paroles de Herzog, qui avait déclaré qu’un ordinateur ne produirait pas un film aussi bon que le sien avant 4 500 ans, Winiewicz a trouvé une assurance dans l’immense œuvre et la voix unique de Herzog.

« Werner apparaît dans le film, mais il n’en est pas le protagoniste. L’idée n’a jamais été de le défier, car cela serait insensé de s’opposer à l’un des plus grands réalisateurs du cinéma, » explique-t-il. En ajoutant que le film aborde un sentiment universel de technophobie et de supériorité, il reste discret sur ses interactions avec Herzog, tout en confirmant que le cinéaste a visionné le film et l’a approuvé après une projection privée.

Bien que la validation de Herzog ait été primordiale pour l’équipe de Winiewicz, l’essentiel était de créer un espace pour des discussions ouvertes sur le processus créatif et les questions délicates soulevées par les thèmes du film. « Le plateau et la phase de pré-production étaient remplis de débats sur la fine ligne entre faire un film sur l’IA et utiliser l’IA comme un outil. Nous avons échangé avec les acteurs, l’équipe technique, et même consulté des avocats sur les implications juridiques, bien que la plupart des enjeux soient d’ordre éthique. »

Winiewicz, bien qu’il soit un romantique du cinéma, souligne l’importance pour l’industrie de reconnaître que le changement est inévitable et de s’engager dans des dialogues significatifs sur la manière d’aborder ces évolutions de manière éthique et créative. « Les professionnels du cinéma sont souvent réticents face aux nouvelles technologies, qu’il s’agisse de la télévision, de la réalité virtuelle ou de l’IA. Cela peut sembler éloigné du lexique romantique du cinéma d’art et d’essai. Pourtant, à la fin, le cinéma demeure une industrie qui a toujours su s’adapter aux avancées technologiques. »

Un des soucis majeurs de Winiewicz était le timing de la sortie du film, qui sera présenté à l’IDFA juste une semaine après l’élection de Trump aux États-Unis, une situation qui lui rappelle le besoin pressant d’aborder les dangers de la désinformation. « Je me suis endormi en pensant à Kamala et me suis réveillé avec Trump, une expérience horrible. Je suis plutôt pessimiste de nature, mais je crois que c’est un moment pertinent pour ce film car il met en lumière les conséquences de la désinformation. L’IA nécessite des ressources considérables pour vérifier une seule image, et des individus isolés peuvent engendrer des impacts terrifiants au sein de la société. »

Néanmoins, Winiewicz est enthousiaste à l’idée de présenter son film à l’IDFA, qu’il considère comme une « excellente plateforme pour engager le dialogue. » « Je ne me sentirais pas à l’aise avec une sortie commerciale massive, à imposer le film aux spectateurs sans ouvrir le débat. C’est une œuvre conçue pour être discutée. »