Un ancien journaliste de la République centrafricaine révèle comment le groupe Wagner, soutenu par le Kremlin, utilise la désinformation pour renforcer l’influence russe en Afrique. Ephrem Yalike-Ngonzo décrit son expérience en tant que propagandiste, contraint de rédiger des articles favorables à Wagner et d’étouffer la dissidence. Les atrocités commises par le groupe, notamment en matière de droits de l’homme, sont mises en lumière, soulignant l’importance de la liberté d’expression et la nécessité de dénoncer ces abus.
Révélations d’un ancien journaliste sur le groupe Wagner en Afrique
Un ancien journaliste de la République centrafricaine (RCA) a exposé comment le groupe Wagner, un réseau de mercenaires soutenu par le Kremlin, met en place des stratégies de propagande et réprime toute forme de dissidence dans le but de renforcer l’influence de la Russie sur le continent africain. Ephrem Yalike-Ngonzo a révélé qu’il avait été chargé de rédiger et de diffuser des articles positifs sur Wagner dans les médias locaux tout en organisant des manifestations anti-occidentales et en étouffant la dissidence gouvernementale depuis 2019. Après avoir fui vers l’Europe plus tôt cette année, il a partagé son récit. Les révélations de Yalike-Ngonzo mettent en lumière le mécanisme de désinformation qui soutient la présence croissante de Moscou en Afrique, notamment son soutien au régime militaire de la RCA. ‘Il est crucial pour moi de raconter cette histoire pour que justice soit rendue,’ a-t-il déclaré. ‘Il faut dénoncer le mépris des droits de l’homme et mettre en lumière le système de désinformation qui pourrait se reproduire ailleurs.’
Les activités du groupe Wagner en Afrique
Le groupe Wagner a été accusé de multiples violations des droits de l’homme tout en apportant son soutien au gouvernement du président Faustin-Archange Touadéra. En s’associant avec des régimes au Mali, en Libye et au Soudan, la Russie se positionne comme un partenaire de sécurité dans des zones où l’influence occidentale a diminué. Au Mali, par exemple, Wagner et l’armée malienne ont été accusés d’exécutions sommaires de près de 300 hommes en 2022, dont de nombreux civils, une atrocité qualifiée de pire par Human Rights Watch dans le conflit de dix ans du pays. Malgré leurs promesses de stabilisation, des rapports indiquent que le groupe aurait formé l’armée de la RCA aux techniques de torture et dissimulé des abus, tels que des mutilations et des exécutions. En exerçant une influence considérable sur les ressources naturelles du continent, Wagner a sécurisé des droits miniers pour l’or et les diamants, contribuant ainsi à financer ses opérations tout en soutenant l’économie russe durant son conflit avec l’Ukraine.
Yalike-Ngonzo, engagé par le groupe en 2019, a d’abord cru qu’il participait à des efforts pacifiques. Approché par un ressortissant russe, il a accepté un salaire mensuel bien supérieur à ses revenus en tant que rédacteur en chef d’un journal local. Son rôle consistait à gérer les relations médiatiques pour Wagner en RCA. Cependant, sa confiance a été sérieusement ébranlée lorsque l’on lui a demandé de créer de fausses histoires pour étouffer toute dissidence. ‘Je me suis rendu compte que c’était contre ma conscience,’ a-t-il déclaré. ‘Ce n’était pas du journalisme… Ils me forçaient à écrire des choses.’ Son poste visait à propager des récits anti-occidentaux et à renforcer l’image du Kremlin dans le pays.
Après plusieurs années à travailler contre les intérêts de son propre pays, Yalike-Ngonzo a commencé à ressentir un profond désenchantement. La situation a atteint un point de rupture lorsque l’on lui a demandé de camoufler des abus commis par ses collègues. Tentant de fuir avec sa famille, il a été bloqué à l’aéroport par les forces de sécurité. ‘Ce sont les Russes qui s’occuperont de vous,’ lui a dit un policier. Réussissant à échapper à cette situation périlleuse, Yalike-Ngonzo a pu quitter la RCA grâce à l’aide de la Plateforme pour protéger les lanceurs d’alerte en Afrique. Malgré les efforts de Wagner pour manipuler l’opinion publique, il déclare que leur propagande n’a pas réussi à gagner le soutien de la population. ‘Les gens n’ont pas une opinion positive des Russes,’ affirme-t-il. ‘Mais beaucoup ont peur de l’exprimer.’
Cette enquête met en lumière les défis auxquels sont confrontés ceux qui tentent de dénoncer les abus et la désinformation, soulignant l’importance de la liberté d’expression et du respect des droits de l’homme.