L’ascension potentielle de Herbert Kickl, leader du FPÖ, à la chancellerie en Autriche soulève des inquiétudes quant à une « orbanisation » du pays, inspirée par la Hongrie. Bien que le FPÖ n’ait pas la majorité nécessaire pour des changements radicaux, les relations étroites de Kickl avec la Russie et ses critiques de la politique culturelle actuelle suscitent des craintes dans le milieu artistique. La dynamique au sein d’une éventuelle coalition avec le ÖVP pourrait également influencer l’Autriche au sein de l’UE.
Autriche et l’UE face à un potentiel gouvernement du FPÖ : quelles implications pour le pays et l’Europe ? L’Autriche pourrait-elle suivre le chemin de la Hongrie ?
Que se passerait-il si Herbert Kickl, le leader du parti d’extrême droite FPÖ, accédait à la chancellerie en Autriche ? Des discussions préliminaires ont déjà débuté en catimini entre Kickl et Christian Stocker, le nouveau chef du parti conservateur ÖVP. Kickl a exprimé son admiration pour Viktor Orban, le Premier ministre hongrois, le qualifiant de véritable modèle pour l’Europe. Une ‘orbanisation’ de l’Autriche serait-elle envisageable ?
Il est important de noter que la situation en Hongrie diffère significativement de celle de l’Autriche. Orban a progressivement remodelé la démocratie hongroise pour établir un véritable bastion du pouvoir. Son ascension a commencé en 2010, lorsqu’il est redevenu Premier ministre après une interruption de huit ans, suite à des défaites électorales qu’il ne souhaitait pas revivre.
En Autriche, peu de figures politiques suscitent autant de polarisation que Kickl, qui a conduit le FPÖ à une résurgence inattendue.
Une ‘orbanisation’ de l’Autriche : mythe ou réalité ?
Orban a remporté l’élection de 2010 avec son parti Fidesz, obtenant 52 % des voix. Le système électoral hongrois, qui privilégie les mandats directs, a permis à Fidesz d’acquérir une majorité des deux tiers au parlement, lui permettant ainsi de modifier la constitution.
Paul Lendvai, un commentateur austro-hongrois reconnu, évoque la stratégie d’Orban : ‘Il a toujours affirmé qu’il suffisait de gagner une seule fois les élections, mais de manière stratégique.’ Il a d’abord mis en place une nouvelle constitution, suivi de modifications de la loi électorale, puis a rempli les postes clés avec des membres de son parti, Fidesz, souligne Lendvai.
Fidesz exerce également un contrôle majeur sur les médias et le système judiciaire. Selon Transparency International, la Hongrie se classe au 76e rang mondial en matière de corruption, tandis que l’Autriche se situe à la 20e position. Récemment, l’Autriche a été secouée par des scandales impliquant l’ancien chancelier du ÖVP, Sebastian Kurz, liés à des nominations douteuses et à des sondages biaisés, ainsi qu’à une couverture médiatique favorable financée par des fonds publics. Des situations similaires pourraient survenir à l’avenir.
Herbert Kickl aspire à devenir le ‘chancelier du peuple’ et se rapproche de cet objectif comme jamais auparavant.
Viktor Orban : un modèle controversé pour l’Europe
Toutefois, l’Autriche ne dispose pas des mêmes moyens qu’Orban pour s’emparer de l’État. Même en coalition avec le ÖVP, le FPÖ ne détient pas une majorité des deux tiers. À l’heure actuelle, le FPÖ compte 57 sièges sur 183 au parlement, représentant environ 29 % des voix lors des dernières élections.
Kickl considère néanmoins Orban comme un exemple à suivre. ‘La Hongrie et l’Autriche, bien que petites avec près de dix millions d’habitants chacune, doivent défendre leurs intérêts et leur souveraineté nationale face aux grandes puissances. C’est exactement ce qu’Orban réalise, ce qui en fait un modèle pour de nombreux pays européens’, déclare Kickl.
L’avenir de l’Autriche en tant que contestataire au sein de l’UE dépendra également de la dynamique au sein de la coalition potentielle. Le ÖVP, en tant que parti pro-européen, privilégie les partenariats. Néanmoins, des divergences plus profondes pourraient émerger en politique étrangère, car comme Orban, Kickl entretient des relations étroites avec la Russie et plaide pour une cessation du soutien militaire à l’Ukraine.
Le FPÖ s’inscrit dans une alliance d’extrême droite avec le parti Fidesz de Hongrie et l’ANO en République tchèque.
Préoccupations dans le milieu artistique et culturel
Le monde de l’art et de la culture en Autriche suit avec une grande inquiétude l’évolution politique, surtout depuis que Kickl a critiqué la politique culturelle actuelle du gouvernement ÖVP-Verts. ‘La politique culturelle verte ressemble à un mélange hétéroclite, flatterie de la scène artistique de gauche, et un engagement constant contre le fascisme. C’est rempli d’expressions variées, mais souvent axé sur les questions de genre’, a déclaré Kickl avec ironie lors d’un discours au parlement.
Ces déclarations suscitent des craintes quant à une possible exclusion des formes d’art et de culture qui ne trouvent pas grâce aux yeux de Kickl, notamment en matière de financement public, comme cela a été observé en Hongrie.