L’essor de l’industrie pharmaceutique suisse face aux menaces tarifaires de Trump : opportunités et risques de concentration

L'essor de l'industrie pharmaceutique suisse face aux menaces tarifaires de Trump : opportunités et risques de concentration

La politique douanière incertaine du président américain Donald Trump soulève des inquiétudes pour l’industrie pharmaceutique suisse, dominée par Roche et Novartis. Ce secteur, qui représente 5 % de l’économie suisse et est le principal moteur de croissance, pourrait subir des impacts significatifs si des droits de douane étaient instaurés. Environ 60 % des exportations suisses vers les États-Unis proviennent de l’industrie pharmaceutique, essentielle pour la prospérité économique du pays.

La politique douanière imprévisible du président américain Donald Trump génère une incertitude à l’échelle mondiale. En effet, des droits de douane pourraient être appliqués aux médicaments importés aux États-Unis, une annonce faite par Trump peu après son entrée en fonction. L’objectif est de favoriser la production de produits pharmaceutiques sur le sol américain.

Cette menace de droits de douane suscite des inquiétudes en Suisse, où deux des plus grandes entreprises pharmaceutiques, Roche et Novartis, sont directement concernées. Il est donc crucial de comprendre l’importance de l’industrie pharmaceutique dans l’économie suisse et son degré de vulnérabilité face à cette situation.

La montée en puissance de l’industrie pharmaceutique

Pour évaluer l’importance d’un secteur dans la prospérité d’un pays, il est essentiel de considérer sa contribution à la création de valeur économique. Au cours des 25 dernières années, l’industrie pharmaceutique a connu une ascension marquée. Au début des années 2000, elle représentait seulement 2 % de l’économie suisse, alors qu’aujourd’hui, cette proportion a grimpé à 5 %.

Ce secteur s’est ainsi imposé comme l’un des piliers de l’économie suisse, surpassant même le secteur bancaire, qui avait longtemps été le symbole de la solidité économique du pays. La crise financière de 2007/08 a affaibli l’importance de ce dernier, laissant plus de place à la pharmacie.

Comparativement à d’autres secteurs économiques, l’industrie pharmaceutique brille par sa contribution. Bien que l’agriculture ait une forte influence politique, elle représente seulement un dixième de la valeur ajoutée générée par les entreprises pharmaceutiques.

Une source essentielle de croissance

Au cours de la dernière décennie, l’industrie pharmaceutique s’est révélée être le moteur principal de la croissance économique en Suisse. Depuis 2012, le produit intérieur brut (PIB) suisse a progressé de 1,9 % par an, en termes réels. Selon une étude de BAK Economics, 40 % de cette croissance est attribuée à l’industrie pharmaceutique.

Bien que d’autres secteurs, tels que la finance, la santé et les services informatiques, contribuent également à la croissance, leur impact cumulé reste inférieur à celui de la pharmacie. Cette importance découle de l’augmentation considérable de la productivité des fabricants de médicaments suisses au cours de la dernière décennie. Sans l’apport de l’industrie pharmaceutique, la prospérité économique en Suisse aurait été bien plus faible.

Le rôle prépondérant dans le commerce avec les États-Unis

Avec sa croissance rapide, l’industrie pharmaceutique s’est imposée comme le premier secteur d’exportation de la Suisse, surpassant les machines et les montres. Les produits pharmaceutiques représentent environ 40 % de la valeur totale des exportations suisses, englobant également des vitamines, des diagnostics et des substances actives.

Dans les échanges commerciaux avec les États-Unis, l’industrie pharmaceutique occupe une position dominante. Près de 60 % des exportations suisses vers les États-Unis proviennent de ce secteur. Ce marché représente une opportunité lucrative pour des leaders comme Roche et Novartis, qui peuvent y pratiquer des prix élevés.

Une partie des médicaments commercialisés y est non seulement développée, mais également produite en Suisse avant d’être expédiée de l’autre côté de l’Atlantique. Des entreprises comme Roche fabriquent des produits tels que Hemlibra, utilisé pour traiter l’hémophilie, en Suisse, tout comme d’autres médicaments innovants. Des sociétés comme Novartis, Lonza, Bachem et plusieurs entreprises américaines possèdent également des usines de production en Suisse, se spécialisant dans des substances actives de haute qualité par le biais de procédés biotechnologiques.

Les conséquences potentielles des droits de douane

Quel impact pourrait avoir l’imposition de droits de douane sur les produits pharmaceutiques pour l’économie suisse ? Les réactions pourraient varier. Des entreprises comme Roche et Novartis pourraient tenter de répercuter les coûts supplémentaires sur leurs clients, entraînant une hausse des prix des médicaments aux États-Unis sans nécessairement réduire les exportations suisses.

À moyen terme, il est possible que certaines entreprises choisissent de déplacer davantage leur production vers les États-Unis, ce qui pourrait diminuer la part de la valeur ajoutée pharmaceutique générée en Suisse. Cependant, l’ampleur de cet impact reste incertaine, car il n’existe pas de données précises sur la contribution de la production à la valeur ajoutée de l’industrie pharmaceutique en Suisse.

Il est important de noter que les activités de recherche et développement, notamment à Bâle, sont souvent considérées comme très productives. Selon Interpharma, les entreprises membres investissent annuellement environ 9 milliards de francs dans la recherche en Suisse. De plus, les sièges sociaux jouent un rôle crucial dans les opérations mondiales, représentant une part significative de la valeur ajoutée pharmaceutique en Suisse, qui ne serait pas directement affectée par les droits de douane américains.

Enfin, il convient d’être prudent avec les chiffres d’exportation, qui peuvent parfois induire en erreur. Les exportations ne traduisent pas toujours la valeur ajoutée réelle. Par exemple, lorsque Roche ou Novartis exportent des médicaments, ils peuvent facturer le prix plein, mais des étapes de production dans d’autres pays doivent être prises en compte pour évaluer la contribution réelle à la production suisse.

Cette nuance est d’autant plus importante que l’industrie pharmaceutique fonctionne souvent dans un cadre de production global, où un médicament peut passer par plusieurs étapes de fabrication dans différents pays, soulignant la complexité de cette industrie dynamique.