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FL’acteur et cinéaste ranco-sénégalais Mati Diop est entré dans l’histoire en 2019 en tant que première femme de couleur à voir un film sélectionné en compétition à Cannes, le drame poétique des migrants Atlantique. Elle présente désormais à Berlin un long métrage documentaire intrigant de 67 minutes : une sorte de jeu d’esprit réaliste ou de rêverie interrogative sur le colonialisme, la culture, le passé et le présent. Dahomey raconte le retour en 2021 de trésors pillés par la France à l’État ouest-africain du Bénin, objets pillés par les troupes françaises en 1892. Il s’agit notamment des figures zoomorphes audacieuses et mystérieuses du roi Ghezo (qui a gouverné ce qui s’appelait alors Dahomey de 1797 à 1818) et ses héritiers Glèle et Béhanzin, représentés avec des têtes d’oiseau ou de lion ou de requin pour suggérer leurs pouvoirs surnaturels. Les Britanniques ont leur propre butin, les bronzes du Bénin, qui proviennent en fait de la ville de Benin dans l’actuel Nigeria, dont certains ont également été restitués.
Le Dahomey est raconté en partie du point de vue de l’artefact pillé et la voix désincarnée et déformée de Ghezo évoque ses années d’obscurité et d’emprisonnement. Certaines scènes montrent, dans un style documentaire classique et sans hâte, les employés du musée emballant les objets et d’autres les déballant à l’autre bout du fil ; l’un d’eux dit, un peu tendu, que la statue contre laquelle ils se débattent ne doit pas être soulevée par la nageoire mais par la tête. (Il est possible d’imaginer Frederick Wiseman réaliser un documentaire sur ce sujet quatre fois plus long, composé simplement de scènes comme celles-ci.)
Mais le film prend vraiment vie dans les débats sur le retour des artefacts sur les campus universitaires, qui ont l’énergie percutante de quelque chose des godardiens des années 1960. Les étudiants sont passionnés, articulés et souvent brillants ; beaucoup soulignent que seuls 26 articles ont été retournés sur un total de milliers, et qu’il s’agit en fait d’une sorte d’insulte. Mais d’autres estiment qu’il s’agit là d’une voie sans issue : un canal de conversation diplomatique entre la France et le Bénin doit rester ouvert.
Un autre observateur remarque que des restitutions de ce type se produisent parallèlement au fait que les descendants de la diaspora béninoise en Europe et aux États-Unis envisagent leur propre retour au pays. D’autres encore suggèrent que la véritable culture et la signification du Bénin ne résident en aucun cas dans ces objets matériels et leur localisation, mais dans ce que le peuple béninois pense et crée en ce moment. Il s’agit d’un film revigorant et vivifiant, avec des implications évidentes pour les marbres d’Elgin/Parthénon du British Museum.