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JQue le violoniste Julian Rachlin ait pu suivre un concerto à couper le souffle avec un rappel aussi long, exigeant et fabuleusement intense que la Sonate n° 3 en un seul mouvement d’Ysaÿe, sans fausser l’équilibre du reste du concert, donne une idée de la puissance de ce programme . Ce fut une soirée extraordinaire de la part de Rachlin, du London Philharmonic et de Klaus Mäkelä, le Finlandais de 27 ans déjà désigné pour être le prochain chef d’orchestre du Concertgebouw.
Le Concerto pour violon n° 1 de Chostakovitch est une pièce longue et exténuante pour un violoniste, mais une pièce que Rachlin semblait visiblement apprécier même à mi-parcours du finale. Son phrasé délibéré et soigné au tout début a donné le ton d’une performance dans laquelle rien n’a été jeté, pas même dans les épisodes les plus frénétiques, que Mäkelä a conduits fort et vite. Dans les longues lignes du dernier mouvement, le violon de Rachlin continuait à chanter alors même que le son orchestral gonflait derrière lui ; à la fin, il semblait invincible.
Quelque chose d’invincible parcourt aussi la Symphonie n° 2 de Thomas Larcher : est-ce la mer, la peur ou la volonté de vivre ? Cette œuvre de 2016, sous-titrée Kenotaphe, est une commémoration poignante des milliers de réfugiés qui se sont noyés en Méditerranée. C’est une écriture éblouissante qui parvient à évoquer la terreur avec ses sons de grosse houle et la panique avec ses tintinnabulations cliquetantes, mais qui est aussi presque ludique dans sa manière légère de références et de timbre – une touche fugace de Bach, une respiration poussive accordéon, percussions râpeuses qui semblent périodiquement lessiver la hauteur du reste de l’orchestre. Sa portée est mahlérienne, et cela sonnait comme un chef-d’œuvre ici, Mäkelä tirant une performance d’une énorme assurance de la LPO.
Suivre le Larcher avec l’Adagio de la 10e symphonie de Mahler semblait tout à fait approprié – et pourtant l’approche affirmée de Mäkelä, soulignant l’angularité de ses mélodies, ne lui a pas tout à fait permis d’atteindre la transcendance. C’était toujours émouvant, cependant, et le fait que même cette pièce puisse sembler décevante dans son contexte ne fait que parler de l’impact de ce que nous avions déjà entendu.