Customize this title in frenchBudget 2024 : les stratégies des députés pour peser

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Alors que l’examen du budget 2024 démarre ce mardi à l’Assemblée, les députés connaissent déjà la fin du film : l’utilisation par le gouvernement de l’article 49.3 de la Constitution, afin d’assurer l’adoption de ce texte éminemment politique, faute de majorité absolue.

Alors les députés se lancent-ils dans des semaines de débat pour rien ? Pas vraiment, pour les plus pugnaces : « Non, on n’a pas la main. Est-ce qu’on doit démissionner tout de suite ? Je ne crois pas», lance la socialiste Christine Pirès-Beaune.

La spécialiste des deniers publics compte « mettre la pression » sur le banc des ministres, qui auront le pouvoir de faire directement le tri dans les amendements. « Qu’ils assument leurs choix devant les Français et qu’ils en subissent les conséquences », menace-t-elle, forte d’une cinquanteaine d’amendements déposés en son nom.

Dégainer vite et fort

D’ailleurs, si la motivation des parlementaires se mesure au nombre de leurs propositions, le cru 2024 s’annonce exceptionnelle avec près de 3000 amendements déposés en commission rien que sur les recettes de l’Etat (contre 1500 en 2022 et un gros millier en 2021).

« On a perdu une partie d’influence puisqu’efficacement, certains débats n’existeront pas dans l’hémicycle. C’est la raison pour laquelle il y a d’ailleurs énormément d’amendements en commission», avance en guise d’explication Véronique Louwagie, pilier des lois de finances pour Les Républicains et auteur de 90 amendements.

Selon elle, le nombre de collègues qui siègent dans d’autres commissions se sont empressés de déposer des amendements en amont de l’examen en séance, de peur que le 49.3 ne soit engagé avant leur discussion.

Choisir ses combats

Contraint par des délais serrés, l’examen budgétaire exige de conjuguer habitude et expertise.

Tout comme Christine Pirès-Beaune, Véronique Louwagie explique à POLITICO avoir « choisi ses combats » pour avoir une chance d’influencer, au moins à la marge, sur la copie finale. Selon elle, « il faut y aller dès que vous sentez qu’on ébranle » le gouvernement, quitte à rassembler « des majorités hétéroclites », comme sur MaPrimeRénov’ l’année dernière.

A défaut de pouvoir exercer pleinement leurs prérogatives, les députés compétents mettent le gouvernement dos au mur.

Dans ce contexte, l’exécutif sait que le timing choisi pour le déclenchement du 49.3 aura ainsi son importance — en 2022, le vote de la hausse de la fiscalité des dividendes avait créé des remous. «C’est compliqué démocratiquement d’expliquer qu’une mesure est non retenue quand elle a été votée par la Représentation nationale», admet ainsi un élu de la majorité.

Tenter le repêchage

L’année dernière, le gouvernement avait tout de même retenu une petite centaine d’amendements à l’issue des débats, plus ou moins décoratifs. Bruno Le Maire espère que l’examen du budget 2024 permettra de réaliser « un milliard d’euros d’économies supplémentaires », et en appelle aux bonnes idées des membres de la majorité.

« Ce qui est, c’est qu’il n’y aura pas d’amendements qui modifient sûrement substantiellement la trajectoire budgétaire », anticipe Louis Marguerite. Malgré la contrainte du 49.3, le député Renaissance pense que lui et ses collègues peuvent « donner une deuxième couche » au projet de loi de finances, à deux conditions : « ne pas arriver avec une liste de quarante cours » et « être en contact avec le ministre, mais aussi avec son cabinet ».

Bien entendu, assumer un poste à responsabilité peut aider à se faire entendre. Jean-Marc Zulesi (Renaissance), président de la commission du développement durable, va par exemple verser au débat toute une série de mesures sur la fiscalité de l’aérien ou la conversion des moteurs thermiques, tout en surveillant de près la future contribution sur les concessions autoroutieres et aéroportuaires.

«S’il ya un travail de conviction à faire auprès du gouvernement, ce qu’on fait au Parlement est très important», se persuade leur camarade de la majorité, David Amiel, qui cite le logement et l’écologie comme thèmes sur lesquels les députés « peuvent arriver » à faire bouger les lignes.

Des députés pas si démonétisés

Interrogé par POLITICO, Thomas Cazenave assure vouloir travailler avec les parlementaires, y compris sur la rédaction de certaines propositions. «Je souhaite qu’ils puissent repartir avec des amendements qui leur tiennent à cœur», fait savoir le ministre délégué aux Comptes publics, qui n’était pas encore aux manettes lors du précédent budget.

Autre preuve que la discussion parlementaire n’est pas à jeter aux orties, plusieurs représentants d’intérêts nous ont expliqué pourquoi ils ont continué de démarcher le pouvoir législatif.

Un lobbyiste dans le secteur des transports rappelle que l’année ne se résume pas aux seuls textes budgétaires : « Le gouvernement ne veut pas humilier complètement le Parlement, car il lui faut une majorité sur les autres textes. » Hors budget de l’Etat et de la Sécurité sociale, le gouvernement ne peut en effet utiliser le 49.3 que sur un seul autre texte par session parlementaire.

Un autre, qui travaille dans le secteur de l’énergie, nous explique continuer spontanément à solliciter des parlementaires sur le budget afin de « ne pas perdre la main ». Tout simplement.

Sarah Paillou a contribué à cet article.



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