Grèves en France : est-ce une tactique qui fonctionne réellement pour faire changer d’avis le gouvernement ?


La France a été frappée par une autre vague de grèves cette semaine, le sixième jour d’action collective de masse appelée par les syndicats pour protester contre les réformes controversées des retraites qui, entre autres changements, augmenteraient l’âge de la retraite de 62 à 64 ans.

Les syndicats espèrent paralyser le pays mardi avec les trains et les bus, les avions, l’éducation, la production d’énergie et la collecte des ordures tous impactés.

En 2020 et 2021, la France comptait l’un des plus grands nombres de jours perdus en raison de grèves, 79, de tous les pays de l’Union européenne.

Mais est-ce une tactique efficace, et l’action revendicative forcera-t-elle le gouvernement à revenir sur ses réformes des retraites ?

« Lors de chaque manifestation dans le passé, il y a eu soit un abandon, soit un amendement ; des concessions ont été faites aux différents syndicats qui s’étaient mobilisés », explique Bruno Palierdirecteur de recherche chez Sciences Po université parisienne.

Voici un aperçu de certaines des plus grandes grèves en France ces dernières années et de l’impact qu’elles ont eu :

1995 : Grèves pour la réforme des retraites de la fonction publique

La grève de 1995 reste le plus grand succès pour faire basculer les politiques gouvernementales en faveur des masses.

Les grèves protestaient contre un plan du Premier ministre Alain Juppé qui visait à aligner le système de retraite des fonctionnaires et employés des entreprises publiques (dont les sociétés de transport SNCF et RATP) sur celui du secteur privé. La perspective de travailler 40 ans, au lieu de 37 ans et demi, pour bénéficier d’une retraite à taux plein, a déclenché un mécontentement qui a conduit à des manifestations massives de syndicats dans tout le pays qui ont fini par paralyser les réseaux de transport du pays.

Après trois semaines de paralysie, le gouvernement a fini par abandonner le projet qui avait suscité les protestations.

2003 : Plus de plans de réforme des retraites

Huit ans après la dernière tentative, le Premier ministre François Fillon a de nouveau tenté de réformer les retraites des fonctionnaires et d’assurer un meilleur alignement sur les cotisations de retraite du secteur privé.

Mais cela a également déclenché une action revendicative généralisée.

Après plusieurs semaines de grèves et de manifestations qui rassemblent plus d’un million de personnes à Paris le 13 mai 2003, la réforme est finalement adoptée après un accord avec les syndicats réformistes.

« Les syndicats n’ont pas lancé de protestation, mais ont cherché à obtenir du gouvernement des points de concession, qu’ils ont obtenus notamment sur le calcul des retraites pour les femmes et les dispositifs de départ anticipé pour celles qui ont commencé à travailler plus tôt », explique Bruno Palier.

2010 : âge de la retraite relevé de 60 à 62 ans

La réforme menée par l’ancien ministre Eric Woerth, dernière tentative de réformes, aurait relevé l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans afin de préserver l’équilibre financier du système de retraite par répartition.

Les travailleurs auraient dû travailler pendant 41,5 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein.

Le projet a provoqué une vague de manifestations, dont celle du 12 octobre 2010 qui a réuni plus de trois millions de personnes en France, selon les syndicats (même si le chiffre du ministère de l’Intérieur est bien inférieur).

Les grèves et les blocages dans les raffineries et les dépôts de carburant ont eu un impact direct sur les automobilistes, confrontés à des pénuries d’essence dans les stations-service.

Malgré l’action revendicative, celle-ci n’a pas eu l’impact escompté.

Mais elle n’a pas eu l’impact escompté : « En 2010, il y a eu beaucoup de mobilisation. Mais, la principale mesure – à savoir le passage de l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans – n’a pas été remise en cause », rappelle Bruno Palier. .

2023 : Qu’est-ce qui est différent maintenant ?

Contrairement aux mouvements passés, les grèves de 2023 se caractérisent par un front uni de la part des syndicats.

« Jamais sur la question des retraites, nous n’avions eu tous les syndicats unis pour s’opposer au projet », note Bruno Palier, qui compare la dernière mobilisation à celle de 1995.

« La réforme de 1995 s’est attaquée aux régimes spéciaux et particuliers, comme les professions qui avaient un âge d’entrée plus précoce ; ce sont les mêmes professions qui avaient porté le mouvement. Alors qu’en 2023, c’est l’ensemble de la population qui est concernée par la principale mesure, à savoir la report de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans […] »

« Aujourd’hui, clairement, le gouvernement espère pouvoir faire passer sa réforme au parlement en faisant des concessions à la droite, sans chercher à faire des concessions aux mobilisations syndicales.





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