L’article de Michael Rasch aborde la crise actuelle de Volkswagen, reflet des défis affrontés par l’Allemagne, nation automobile. Face à la nécessité urgente de restructuration, notamment en raison de la transition vers l’e-mobilité et des coûts élevés, VW projette des fermetures d’usines et des licenciements. La concurrence accrue de la Chine et la lassitude face à la mondialisation exacerbent la situation. Pour redresser la compétitivité tant de VW que de l’Allemagne, des réformes profondes s’imposent.
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Certaines entreprises sont si profondément enracinées dans leur pays d’origine qu’il est difficile d’envisager leur avenir sans penser à leur contexte national. Volkswagen, avec ses marques emblématiques comme VW, Audi et Porsche, est l’un des plus grands employeurs du secteur automobile et un élément essentiel de l’économie allemande. La crise actuelle à Wolfsburg, notamment celle affectant la marque Volkswagen, illustre la crise plus large que traverse le pays. Il est devenu évident que VW nécessite une restructuration urgente, tout comme l’Allemagne elle-même.
La mondialisation face à de nouveaux défis
À Wolfsburg, les syndicats et les travailleurs de Volkswagen ont longtemps tenu à leurs acquis et avantages, alors que les bénéfices étaient essentiellement réalisés en Chine et par le biais d’autres marques. Cette ère est désormais révolue. Les performances du constructeur en Chine sont médiocres, et ses modèles sont en retard face à des véhicules électriques très prisés. En Allemagne, la situation n’est pas plus brillante. Pendant les années diriger par Angela Merkel, la combinaison de taux d’intérêt bas, de l’affaiblissement de l’euro et des revenus fiscaux élevés a contribué à une redistribution excessive sans générer suffisamment de nouvelles richesses. Les récentes décisions du gouvernement ne sont que le résultat d’une évolution insoutenable.
Les mesures drastiques proposées par la direction de Volkswagen ne doivent donc pas être prises à la légère : elles pourraient entraîner la fermeture de plusieurs usines en Allemagne, des licenciements massifs et des réductions salariales significatives. Bien que la situation puisse sembler moins critique à certains, des réductions profondes sont inévitables et attendues depuis un certain temps.
L’Allemagne, connue pour son industrie automobile et son puissant secteur exportateur, a longtemps tiré des bénéfices du libre-échange. Cependant, les tensions croissantes entre démocraties et régimes autoritaires, les litiges commerciaux et les complications de la chaîne d’approvisionnement, exacerbées par la pandémie, ont considérablement affaibli le processus de mondialisation. Les constructeurs automobiles, avec leurs usines disséminées à travers le monde, ressentent particulièrement ces impacts.
La réputation de l’Allemagne en tant que nation automobile est à la fois une force et une faiblesse. Quand ce secteur rencontre des difficultés, l’ensemble du pays en pâtit. Actuellement, les fabricants et leurs fournisseurs subissent une pression immense, en raison de la transition vers des véhicules électriques. À cela s’ajoutent des défis tels que la numérisation de l’automobile et l’avènement de la conduite autonome, qui nécessitent des décisions courageuses dans un climat d’incertitude et d’importants investissements dans les technologies anciennes et nouvelles. Bien sûr, des erreurs de gestion sont également à prévoir chez les différents acteurs du secteur.
Érosion des conditions de production en Allemagne
Un autre aspect préoccupant est l’érosion des conditions de production en Allemagne, illustrée par les coûts élevés du travail. Les employés allemands de Volkswagen, dont les conventions collectives sont particulièrement généreuses, font face à cette réalité. Des salaires élevés exigent une productivité équivalente. Par ailleurs, l’Allemagne se distingue par des coûts énergétiques conséquents et une bureaucratie croissante, où les préoccupations des riverains et des environnementalistes peuvent entraver la mise en place de nouvelles infrastructures.
Historiquement, l’harmonie entre l’État et le secteur automobile a permis à l’Allemagne de prospérer, notamment grâce à des soutiens publics tels que les incitations fiscales sur les voitures de fonction. Cependant, cela appartient désormais au passé. Dans le nouvel environnement dominé par les voitures électriques, la Chine a saisi les opportunités de ce marché en pleine évolution, devenant le leader mondial. Actuellement, une voiture vendue sur deux en Chine est déjà un véhicule à énergies nouvelles. Ce leadership domestique permet aux fabricants d’optimiser leurs coûts de production, notamment grâce à une main-d’œuvre moins coûteuse et à un contrôle accru sur la production de batteries.
La transition vers la mobilité électrique varie considérablement d’une région à l’autre dans le monde, ce qui complique davantage la tâche des fabricants. L’Allemagne est actuellement en milieu de peloton, mais il est encore temps de rattraper son retard.