Baisse des entrées irrégulières en Europe : une première en trois ans

Baisse des entrées irrégulières en Europe : une première en trois ans

Les entrées irrégulières aux frontières de l’Union européenne ont atteint un niveau historiquement bas en 2024, avec environ 239 000 passages, soit une baisse de 38 % par rapport à 2023. Cette diminution est due à des mesures renforcées en Tunisie et dans d’autres pays. Cependant, des routes migratoires dangereuses persistent, notamment vers les îles Canaries et à travers la Manche, tandis que des mouvements significatifs se produisent vers l’Europe de l’Est, principalement dus à la conscription ukrainienne.

Les entrées irrégulières aux frontières de l’Union européenne ont atteint un niveau historiquement bas depuis 2021. D’après les données fournies par l’agence de protection des frontières, Frontex, environ 239 000 passages irréguliers ont été recensés l’année dernière, marquant une réduction de 38 % par rapport à 2022.

Une tendance à la baisse marquée

Cette chute significative fait suite à une période de trois années de hausse continue. Après avoir atteint un point bas en 2020, dû à la pandémie, les chiffres ont grimpé à des niveaux records en 2023, avec jusqu’à 55 000 passages irréguliers par mois entre les mois d’août et d’octobre. La majorité des entrées se faisaient par la route centrale de la Méditerranée, reliant l’Afrique à l’Italie, ainsi que par la voie des Balkans occidentaux, via la Hongrie et l’Autriche.

La diminution observée en 2024 peut être attribuée à une chute drastique du nombre de migrants utilisant ces deux itinéraires. En 2023, environ 162 000 personnes avaient fait le trajet vers l’Italie, et 98 000 par les Balkans occidentaux, tandis qu’en 2024, ces chiffres sont tombés à 67 000 et 22 000 respectivement.

Une des raisons de cette baisse sur la route méditerranéenne est l’action de la Tunisie, qui a intensifié les mesures pour empêcher les traversées vers l’Italie. En juillet 2023, l’Union européenne a signé un accord avec la Tunisie, stipulant que le pays s’engageait à lutter contre les migrations maritimes en échange de financements importants. D’autres pays, comme la Serbie et le Monténégro, ont également renforcé leurs contrôles aux frontières, introduisant des exigences de visa pour des pays tels que l’Inde, la Tunisie et Cuba, d’où provenaient de nombreux migrants en 2023.

Un avenir migratoire incertain

Il reste à déterminer si ces initiatives vont engendrer un changement durable dans les flux migratoires vers l’Europe. D’autres régions ont également mis en place des accords similaires et renforcé les contrôles. Par exemple, le Maroc a reçu plus d’un milliard d’euros de soutien de l’UE et de l’Espagne depuis 2014 pour limiter la migration irrégulière. En outre, un accord de plusieurs milliards d’euros existe avec la Turquie depuis 2016.

Cependant, en 2024, la majorité des migrants sont arrivés par la route méditerranéenne orientale, passant de la Turquie vers la Grèce. Les principaux groupes concernés sont des personnes en provenance de Syrie et d’Afghanistan, mais on constate également une augmentation du nombre d’Égyptiens fuyant la crise économique dans leur pays, empruntant le trajet de l’est de la Libye vers Chypre et la Grèce. En 2024, une plus grande proportion de femmes a également utilisé cette route, bien que le pourcentage de femmes parmi les migrants reste stable à environ 10 %, deux tiers d’entre elles ayant choisi cette voie.

Les entrées irrégulières en Espagne ont atteint un nouveau sommet l’année précédente. Bien que peu de migrants arrivent par le Maroc, une application plus stricte des contrôles frontaliers a conduit à un changement des flux migratoires vers la côte ouest de l’Afrique.

En 2024, environ 47 000 personnes en provenance de Mauritanie et du Sénégal ont atteint les îles Canaries, le chiffre le plus élevé depuis le début des enregistrements par Frontex en 2009. Cette route est principalement empruntée par des migrants venant de pays comme le Mali ou le Sénégal et est considérée comme l’une des plus périlleuses vers l’Europe. Selon l’Organisation internationale pour les migrations, au moins 1200 personnes ont perdu la vie lors de cette traversée en 2024.

Non seulement sur les côtes de l’Afrique de l’Ouest, mais l’Atlantique a également vu des naufrages de migrants tentant de traverser la Manche. La route reliant la France à la Grande-Bretagne est devenue, l’année dernière, le deuxième itinéraire migratoire irrégulier le plus fréquent en Europe. Notamment, un nombre croissant de Vietnamiens empruntent ce chemin, attirés par les promesses des passeurs sur les réseaux sociaux et les récits de réussite.

Les autorités de protection des frontières en Europe ont observé des tendances similaires avec les migrants en provenance du Bangladesh, qui ont rejoint en grand nombre la route centrale de la Méditerranée vers l’Italie, où une importante diaspora s’est établie. Beaucoup d’entre eux passent d’abord par l’Égypte avant d’entrer dans l’UE via la Libye ou la Tunisie.

En revanche, l’UE a constaté une augmentation significative des passages irréguliers en 2024, loin de ses frontières maritimes. Les entrées par la route est de l’Europe vers la Pologne et les États baltes sont passées de 5800 à 17 000. Cependant, la plupart de ces passages ne sont pas liés à un trafic organisé de migrants africains via la Biélorussie, mais proviennent principalement d’hommes ukrainiens cherchant à échapper à la conscription.

Face à ces défis migratoires variés, le directeur de Frontex, Hans Leijtens, a souligné que la dynamique migratoire évolue chaque année et qu’une vigilance accrue sera essentielle en 2024, malgré la baisse des chiffres. La situation au Moyen-Orient demeure instable, avec 12 millions de réfugiés, le plus grand groupe de déplacés au monde, se trouvant actuellement dans la région du Soudan, sans pour l’instant un mouvement massif vers l’Europe.