La régulation de l’UBS en Suisse suscite des débats intenses, avec des opinions divergentes sur la nécessité d’une grande banque mondiale. Le Conseil fédéral prévoit des mesures plus strictes tout en maintenant son siège en Suisse. Une proposition de garantie de liquidité étatique est en discussion, visant à protéger les banques en crise. Cependant, des experts soulignent le coût insuffisant de cette garantie et appellent à des exigences réglementaires plus strictes pour éviter des risques pour les contribuables.
Comment la Suisse doit-elle aborder la régulation de l’UBS ? Cette question controversée s’impose comme l’un des enjeux majeurs de l’année politique 2025. Les opinions divergent largement. D’un côté, certains soutiennent qu’une grande banque mondiale est essentielle pour le pays, mettant en garde contre des exigences trop strictes qui pourraient provoquer un exode des banques. De l’autre, d’aucuns affirment que les contribuables suisses seraient plus sereins si le siège de l’UBS était transféré à l’étranger.
Le Conseil fédéral a clairement exprimé son intention de maintenir le siège de l’UBS en Suisse, comme l’indique son rapport sur les répercussions de la crise de Credit Suisse survenue en 2023. Toutefois, il a également annoncé des mesures plus strictes qui pourraient déjà sembler excessives pour l’UBS.
Initiatives des Conseillers aux États
Une proposition de réforme significative est déjà en discussion au sein du Parlement. La Commission de l’économie du Conseil des États a prévu de mettre à l’ordre du jour, en février, un projet visant à établir une garantie de liquidité étatique pour les banques jugées systématiquement importantes. En cas de crise, si ces institutions ne peuvent pas bénéficier de l’aide de liquidité ordinaire de la Banque nationale (BNS) pour des raisons de manque de garanties, la BNS pourrait intervenir grâce à cette réforme, avec une garantie de perte fournie par la Confédération en retour.
Un tel filet de sécurité vise à rassurer les clients des banques concernées et à réduire le risque de paniques bancaires. Bien que le Conseil fédéral ait présenté cette réforme au Parlement en 2023, la commission compétente du Conseil des États a décidé d’attendre la remise du rapport de la Commission d’enquête parlementaire (CEP) sur le cas de Credit Suisse avant de poursuivre.
Avec la publication du rapport de la CEP, la commission a exprimé sa préférence pour suspendre le dossier jusqu’à ce que l’ensemble des propositions du Conseil fédéral soit connu. Corinne Zellweger-Gutknecht, professeure de droit à Bâle, l’a souligné lors d’un symposium à Zurich sur la régulation des grandes banques, organisé par sept universités. Elle a soulevé que la proposition de garantie de liquidité étatique n’est pas en phase avec d’autres questions en suspens, notamment l’extension des garanties à des banques majeures.
La garantie de liquidité ne serait invoquée que dans le cadre d’une liquidation, un processus initié par les autorités lorsque la banque ne peut plus subsister. Ce processus peut inclure des restructurations et, dans le pire des cas, une faillite. Le Conseil fédéral vise à limiter cette garantie aux banques en liquidation pour éviter des incitations perverses. Cependant, cela peut signifier que cet instrument ne sera pas applicable lors de certaines crises, comme ce fut le cas avec Credit Suisse, qui n’était pas officiellement en liquidation.
Un point de discorde majeur réside dans le coût de cette garantie. Le Conseil fédéral a évoqué des frais d’assurance jugés modestes, estimés entre 70 et 210 millions de francs par an pour toutes les banques systématiquement importantes. Toutefois, selon Corinne Zellweger-Gutknecht, ce montant serait largement insuffisant, la valeur estimée de la garantie d’État étant au moins dix fois plus élevée. D’autres experts partagent également cet avis, ce qui pourrait engendrer de nouvelles discussions.
Le symposium à Zurich a mis en lumière la variété des perspectives concernant la régulation future des grandes banques. Parmi les thèmes évoqués, on retrouve le renforcement de la crédibilité des plans de crise pour la liquidation des banques, des exigences de liquidité et de capital plus strictes, une responsabilité réglementaire accrue pour les dirigeants, ainsi que des possibilités d’intervention précoce pour l’autorité de surveillance Finma.
L’espoir persiste
Sur certains points, le Conseil fédéral semble réceptif aux préoccupations des experts, tandis que sur d’autres, ces derniers aspirent à des mesures plus ambitieuses. Depuis la crise financière de 2008, les autorités ont élaboré des concepts de liquidation pour les grandes banques afin de minimiser les risques pour les contribuables. Toutefois, aucune banque systématiquement importante n’a été liquidée selon ces plans, bien que Credit Suisse aurait pu être le premier cas.
Des experts ont affirmé qu’un régime de liquidation crédible pour les grandes banques internationales est envisageable, mais les détails de sa mise en œuvre restent à définir. Sarah Breeden, vice-gouverneure de la Banque d’Angleterre, a reconnu que des accords avec les autorités américaines sont nécessaires pour garantir la conversion de capital de réserve en nouveau capital propre.
Les représentants suisses doutent que de telles assurances soient fournies à l’avance par les autorités américaines. Breeden a évoqué des « discussions constructives » sur le sujet. Cependant, même si ce problème est résolu, la question demeure : comment garantir qu’une liquidation préparée ne soit pas entravée par des craintes politiques ? La réponse de Breeden souligne que, en tant qu’autorité, il est essentiel de maintenir une communication ouverte et constructive.