Elon Musk adopte une approche réactionnaire visant à transformer les institutions américaines, inspirée par les idées de Curtis Yarvin. Son plan inclut un « renouvellement systématique » des structures de pouvoir, avec un parallèle à une éventuelle seconde présidence de Donald Trump. Des figures politiques soutiennent ces idées, et Musk agit déjà pour démanteler des agences gouvernementales, suscitant des inquiétudes quant à l’émergence d’une oligarchie autoritaire. Les titans de la technologie envisagent une gouvernance sans contraintes, remettant en question les fondements de la démocratie.
Elon Musk et la Vision d’un Pouvoir Réactionnaire
La stratégie d’Elon Musk semble s’inspirer d’un schéma classique de penseur réactionnaire de la Silicon Valley. En tant que ‘PDG-dictateur’, le milliardaire le plus riche du monde cherche à dominer l’appareil gouvernemental. Donald Trump joue un rôle secondaire de ‘superviseur’, alors que la démocratie américaine est mise à mal.
Ce plan, audacieux à première vue, évoque une ‘armée de ninjas parachutistes’ qui seraient ‘largués au-dessus des autorités exécutives’. Leur mission ne serait pas de régner, mais de s’attaquer à la structure gouvernementale : une ‘armée magnifique’ de fervents partisans ‘idéologiquement formés’ et dévoués, lâchés sur la bureaucratie américaine pour ‘prendre le contrôle de chaque institution’ qui ne sera pas liquidée.
Un Projet de Réforme Systématique
L’objectif de cette vision est de provoquer un ‘renouvellement systématique’ des institutions américaines, un concept qui ne relève pas d’un scénario de film d’horreur ou d’un thriller Netflix. Il s’agit plutôt d’un plan de bataille ultraréactionnaire en faveur d’une seconde présidence de Donald Trump, dont l’émergence n’était pas encore évidente à l’époque de sa publication. Cette proposition de purification autoritaire des programmeurs et théoriciens de droite a été formulée par Curtis Yarvin, bien avant que Trump n’annonce son retour à la Maison Blanche.
Les bastions de pouvoir en dehors du gouvernement sont également dans le viseur des troupes d’assaut de Yarvin. ‘Les ninjas devront également se poser sur les toits de ces institutions – notamment le journalisme, les universités et les réseaux sociaux. Le nouveau régime doit s’emparer de tous les lieux de pouvoir, sans se soucier des contraintes administratives.’
Il y a trois ans, la vision dystopique de Yarvin n’était qu’un simple fantasme d’un geek de la Silicon Valley. Aujourd’hui, elle prend une ampleur plus sérieuse. Yarvin n’est pas seulement le philosophe maison du capital-risqueur Peter Thiel ou un théoricien du tech-autoritarisme. Des figures politiques comme le vice-président américain J.D. Vance soutiennent ouvertement ses idées. Avant même les élections, des signes laissaient entendre que des milliardaires ultraréactionnaires pourraient réaliser leurs rêves de dictature technologique de droite avec Trump.
Alors que le réaménagement radical de l’appareil gouvernemental par le comité de réduction des coûts de Musk, Doge, avance, les craintes grandissent quant à une éventuelle transformation de l’Amérique en une oligarchie autoritaire, comme l’a averti Joe Biden dans son discours d’adieu. En comparant le plan de Yarvin pour une prise de pouvoir par Donald Trump et les actions concrètes d’Elon Musk depuis son arrivée au pouvoir, on est frappé par la proximité de cette vision avec la réalité. ‘Musk adopte une approche systématique, déjà esquissée depuis des années dans des forums publics’, écrit le journaliste américain Gil Duran, l’un des premiers à avoir mis en lumière le modèle de Yarvin pour cette réorganisation gouvernementale.
Depuis longtemps, les titans de la technologie, tels qu’Elon Musk et Peter Thiel, estiment que l’État devrait être géré comme une entreprise, convaincus qu’ils détiennent les solutions appropriées, qu’ils sont les dirigeants nés, aptes à gouverner sans restrictions. La fin de la démocratie fait partie intégrante de leur plan.
L’Avènement d’un Nouveau Régime
Dans son essai, Yarvin a déjà plaidé en 2022 pour un ‘redémarrage complet du gouvernement’ dans le cadre d’une éventuelle seconde administration Trump : ‘Nous ne pourrons y parvenir qu’en conférant une souveraineté totale à une seule organisation.’ Il évoque une ‘autorité d’occupation’, dotée de ‘pouvoirs similaires à ceux des Alliés au Japon ou en Allemagne à l’automne 1945’. Une autre métaphore qu’il utilise est celle d’une ‘larve’ que le président installe par sa réélection et qui se transforme ensuite ‘en un magnifique papillon’, prêt à gouverner.
Cependant, selon Yarvin, le ‘cerveau’ de cette ‘révolution des papillons’ ne sera pas Trump en tant que président élu. ‘Il ne sera pas le PDG. Il sera le superviseur du conseil d’administration – il choisira le PDG (un manager expérimenté).’ Une fois Trump investi, ce processus sera achevé – et ‘la transition vers le nouveau régime débutera immédiatement.’
Dès 2012, bien avant l’émergence de Trump sur la scène politique, Yarvin, sous le pseudonyme de ‘Mencius Moldbug’, avait clairement défini ce ‘PDG national’ : ‘On appelle cela un dictateur. Si les Américains souhaitent changer leur gouvernement, ils doivent surmonter leur peur des dictateurs.’
Les similitudes avec les débuts d’une seconde présidence de Trump sont indéniables : Donald Trump a déjà désigné Elon Musk comme le PDG suprême du gouvernement durant sa campagne électorale et l’a nommé dès son entrée en fonction. Depuis, le milliardaire démantèle méthodiquement une agence après l’autre. Kara Swisher, journaliste technologique au ‘New York Times’, qualifie Musk de ‘démolisseur à lui tout seul’, tandis que Gil Duran a rebaptisé l’acronyme de son équipe de réduction des coûts Doge : ‘Destruction of Government by Elon’ – Destruction du gouvernement par Elon.
Musk détient des pouvoirs presque illimités : il ferme sans préavis les bureaux des diplomates de carrière, supprime l’agence d’aide au développement du jour au lendemain. Il a accès aux systèmes de paiement du ministère des Finances, ce qui lui permet d’accéder aux données sensibles et aux numéros de sécurité sociale de tous les Américains. Les conflits d’intérêts potentiels, en tant que partenaire commercial avec ses entreprises lors de l’examen des coûts, doivent, selon la Maison Blanche, être contrôlés par lui-même. Qu’est-ce qu’un dictateur, sinon quelqu’un qui se gouverne sans contrôle ni contrepoids ?