Les lutteuses de sumo « brisent les préjugés » au Brésil


São Paulo (AFP) – Si l’expression « lutteur de sumo » évoque un homme asiatique costaud en pagne, Valeria et Diana Dall’Olio, une équipe mère-fille de lutteurs de sumo du Brésil, ont un message : détrompez-vous.

Les Dall’Olios sont habituées à ce que les gens se disent trop petits, trop fragiles ou trop féminins pour pratiquer un sport typiquement associé aux hommes japonais costauds.

Mais ils disent que ce n’est que du carburant pour leur esprit combatif lorsqu’ils entrent dans le « dojo » ou le ring.

« Il y a beaucoup de préjugés. Quand on dit qu’on pratique le sumo, certains pensent qu’il faut être gros », confie à l’AFP Valeria, 39 ans, alors qu’elle se prépare pour une compétition dans un gymnase public de Sao Paulo.

Les lutteuses de sumo mère-fille brésiliennes Valeria et Diana Dall’Olio © Miguel SCHINCARIOL / AFP

« Les femmes sont toujours sous le microscope dans les arts martiaux, car ce sont des sports qui ont généralement été réservés aux combattants masculins. »

Elle s’est lancée dans les arts martiaux dans son enfance, étudiant le judo et le jiu-jitsu.

En 2016, elle tombe amoureuse du sumo, introduit au Brésil par des immigrants japonais au début du XXe siècle.

Valéria sur le ring
Valéria sur le ring © Miguel SCHINCARIOL / AFP

Bientôt, elle a remporté des combats – jusqu’au titre national brésilien, qu’elle a remporté à trois reprises (2018, 2019 et 2021) dans la catégorie des poids moyens (65 à 73 kilogrammes, 143 à 161 livres).

Elle a ajouté le championnat sud-américain à son trophée en 2021.

« Plus d’esprit combatif »

« J’essaie d’équilibrer mes différentes vies : femme au foyer, mère de deux enfants. Je n’ai pas beaucoup de temps libre », explique Valeria.

Les femmes sont interdites de sumo professionnel au Japon.

« Les femmes sont toujours sous le microscope dans les arts martiaux », déclare Valeria © Miguel SCHINCARIOL / AFP

Dans son berceau, ce sport hautement ritualisé est lié depuis plus de 1 500 ans à la religion shinto, dont les croyants considèrent traditionnellement les femmes comme impures ou porte-bonheur pour le sumo.

Dans le passé, il était interdit aux femmes d’assister à des combats ou même de toucher des lutteurs de sumo.

Mais un championnat international amateur de sumo féminin est organisé depuis 2001. Les organisateurs espèrent en faire un jour un sport olympique.

Être autorisé à concourir « est une vraie victoire pour nous », déclare Valeria.

« Nous avons plus d’esprit combatif que les hommes, qui ne sont généralement pas habitués à se battre sur autant de fronts que nous. »

Les combats de sumo durent rarement plus de 30 secondes.  La force, la stratégie et la technique sont tout
Les combats de sumo durent rarement plus de 30 secondes. La force, la stratégie et la technique sont tout © Miguel SCHINCARIOL / AFP

Diana, 18 ans, dit qu’elle n’a jamais eu beaucoup d’intérêt pour la lutte – jusqu’à ce qu’elle soit attirée par le sumo par sa vitesse.

Les combats, dans lesquels les lutteurs s’affrontent pour tomber ou se pousser à partir d’un anneau circulaire en terre battue, durent rarement plus de 30 secondes.

La force, la stratégie et la technique sont tout.

Diana a enfilé un « mawashi », ou pagne sumo, pour la première fois en 2019.

Elle concourt maintenant en tant que poids léger (moins de 65 kilogrammes).

« Vous pouvez sentir les préjugés », dit Diana à propos des réactions des gens à son choix de sport © Miguel SCHINCARIOL / AFP

« Vous pouvez sentir les préjugés », dit-elle à propos des réactions des gens à son choix de sport.

« Beaucoup de gens disent: » Les femmes sont fragiles, elles se blessent et arrêtent de fumer «  », dit-elle.

« C’est l’une des choses contre lesquelles nous apprenons à lutter. Ma génération se lève. »

Bataille pour le respect

Le sumo se développe rapidement au Brésil, principalement grâce aux femmes, explique Oscar Morio Tsuchiya, président de la Confédération brésilienne de sumo.

Les femmes représentent environ la moitié des 600 lutteurs de sumo du pays, dit-il.

« A cause des rituels shinto, dans lesquels les femmes ne pouvaient même pas monter sur le ring, beaucoup de traditionalistes ont été horrifiés lorsqu’ils ont commencé à concourir. Mais ces barrières sont en train d’être brisées », dit-il.

Des lutteurs de sumo sur le ring
Des lutteurs de sumo sur le ring © Miguel SCHINCARIOL / AFP

Dans leur salle de sport de Sao Paulo, les Dall’Olios balayent la saleté du dojo après une dure journée, au cours de laquelle Diana a remporté l’un de ses trois combats et Valeria n’en a perdu qu’un, contre Luciana Watanabe, 18 fois championne brésilienne des poids moyens.

Watanabe, 37 ans, est le visage public du sumo au Brésil.

Elle partage sa passion pour le sport en l’enseignant aux enfants de Suzano, une petite ville à forte population nippo-brésilienne à 50 kilomètres (31 miles) de Sao Paulo.

« Les hommes sont généralement ceux qui enseignent le sumo », dit-elle.

Luciana Watanabe , 18 fois championne brésilienne de sumo poids moyen féminin
Luciana Watanabe , 18 fois championne brésilienne de sumo poids moyen féminin © Miguel SCHINCARIOL / AFP

« Mais je pense que j’inspire les enfants quand je leur montre mes titres. »

Elle aussi dit que son objectif est de « briser les préjugés ».

« Je veux que les gens respectent davantage ce sport », dit-elle.

« Beaucoup de gens pensent encore que c’est juste un sport pour les gros. Le sumo est pour tout le monde. »



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